Par Catherine HEURTEBISE, 26/09/2011
Xerfi-Precepta vient de publier une étude approfondie sous le titre : "Le marché des annonces classées : repenser les business models et profiter de la reconfiguration du paysage concurrentiel".
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Après le pic historique de 1,43 milliard d’euros atteint en 2008, le marché français des petites annonces devrait repasser sous la barre du milliard d’euros d’ici à 2015. Ce repli en valeur s’explique par la fin de la logique de couplage print et Web par les annonceurs et surtout par la chute vertigineuse des recettes en provenance de la presse. Celles-ci devraient diminuer en effet des deux tiers entre 2010 et 2015 pour s’établir à 225 millions d’euros (contre 664 millions d’euros en 2010), selon les prévisions des experts de Xerfi-Precepta. Le Web générera les trois quart des recettes d’annonces en 2015.
Les annonces on line suscitent les convoitises
Le segment des petites annonces en ligne progressera de 3 % par an d’ici à 2015, d’après cette étude de Xerfi-Precepta. De quoi susciter bien des convoitises et accélérer la consolidation du secteur à l’avenir. Nombre d’opérateurs entendent en effet profiter de la manne des annonces on line. Cette attractivité explique d’ailleurs les niveaux de valorisation atteints par le site généraliste Leboncoin.fr (400 millions d’euros, soit 18 fois son Ebitda - bénéfice brut avant déduction des charges) ou encore par Seloger.com (plus de 630 millions d’euros, soit 14 fois son Ebitda). Pour autant, le dynamisme des annonces on line ne compense pas le déclin brutal de la presse, et en particulier de la presse gratuite d’annonces (PGA). Ce basculement vers le Web est bien évidemment en train de modifier en profondeur le métier d’éditeur de petites annonces. Le déferlement de pure e-players, l’irruption du gratuit, l’affaiblissement de la prime au premier entrant déstabilisent en effet les business models traditionnels.
De vastes chantiers pour les éditeurs
Cette nouvelle donne du marché des annonces classées va contraindre les acteurs bimédias à gérer le déclin du support papier et donc à ajuster leurs coûts. Ils devront également concentrer leurs efforts sur le numérique. Ce dernier défi exige des investissements importants. Sans oublier que seule une poignée d’acteurs occupe une position forte sur le Web (groupe PAP, groupe Le Figaro…) À l’aube de la migration totale vers Internet (Web, applications mobiles, supports numériques), les acteurs de la PGA apparaissent comme les grands perdants. C’est d’autant plus vrai qu’ils sont déjà entravés par des coûts fixes colossaux et une certaine inertie. Dans un contexte de crise du marché publicitaire, les difficultés de la profession sont légion (redressement judiciaire de Comareg – ParuVendu).
L’émergence des modèles intermédiaires
Aux deux extrêmes de l’économie numérique, le modèle du "tout gratuit" et celui du "tout payant" sont de plus en plus remis en question. Dans ce contexte émerge une troisième voie : celle des modèles intermédiaires. Les succès rencontrés par les stratégies liées au "gratuit tactique" (modèles de financement reposant sur la gratuité d’accès, comme le freemium, la gratuité sélective ou la monnaie virtuelle) dans les sites de rencontres et d’autres secteurs sont ainsi une source d’inspiration pour les professionnels des annonces classées. Leboncoin.fr fournit ainsi un exemple saisissant de réussite économique fondée sur un modèle freemium. Toutefois, si cela valide la pertinence de ce modèle pour des sites généralistes brassant une large audience et de très gros volumes d’annonces, rien ne dit que ce modèle est satisfaisant pour des sites de plus petite taille. Le marché du on line proche de la maturité, les acteurs en ligne spécialisés dans l’immobilier, l’emploi et la rencontre commencent à entrevoir les limites de leur potentiel de croissance en France. Les perspectives d’augmentation de l’audience et du taux de pénétration des annonceurs se réduisent en effet année après année. Outre la dégradation de la conjoncture, trois menaces peuvent peser sur l’évolution des recettes d’annonces on line : tout d'abord l’expansion de la gratuité, notamment sur les plateformes d’annonces mettant en relation les particuliers. ParuVendu et TopAnnonces ont ainsi dû renoncer à la facturation des annonces de particuliers. Ensuite la concurrence des substituts et des nouveaux concepts. Les réseaux sociaux professionnels, comme Linkedin et Viadeo, constituent des concurrents redoutables pour les sites d’emploi. Les plateformes d’intermédiation comme eBay ou PriceMinister sont vite venus chasser sur les terres des sites d’annonces entre particuliers. Enfin on peut noter la possibilité d’une guerre des prix entre les différentes plateformes, compte-tenu de l’arrivée à maturité du marché des petites annonces en ligne.
Face à ces menaces et à la dégradation de la conjoncture, les acteurs du marché des petites annonces peuvent actionner trois leviers. Le premier d’entre eux est la diversification des revenus. Les éditeurs de plateformes d’annonces monnaient de plus en plus leurs compétences techniques et informatiques auprès des annonceurs. La réalisation, l’hébergement et le référencement de sites internet pour le compte de tiers représentent pour beaucoup d’entre eux une part non négligeable des revenus. La diversification géographique est une autre piste à explorer. Mais si le coût de duplication d’une plateforme dans une autre langue est minime, l’investissement comercial et marketing requis pour conquérir un nouveau pays est très lourd. Plus difficile, la troisième option est la montée en gamme avec augmentation des prix en parallèle.
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