A lire sur: http://www.decideur-public.info/article-a-quand-un-enseignement-vraiment-numerique-emmanuel-benoit-groupe-jouve-110534021.html
Mardi 25 septembre 2012
La
nouvelle génération d’écoliers et d’étudiants (entre 6 et 25 ans)
utilise naturellement et plus qu’aucune autre précédente
les ordinateurs, les tablettes, les liseuses numériques et les
smartphones. Génération Y ou encore Digital native, elle est née avec
internet et s’est familiarisée dès son plus jeune
âge avec les nouvelles technologies.
La
génération Y est une utilisatrice compulsive des smartphones,
applications mobiles, jeux vidéos, programmes de
e-learning ou des médias sociaux, quels qu’ils soient. Pour ces
utilisateurs avisés, éclairés et experts naturels du monde numérique, le
maniement de toutes ses nouvelles interfaces numériques
est un reflexe naturel.
Si
l’arrivée récente de tablettes tactiles sur le marché, telles que
l’iPad, a d’ailleurs séduit beaucoup
d’enseignants et d’étudiants dans les faits, aujourd’hui, encore
très peu d’écoles ou d’universités ont réellement adopté les tablettes
tactiles dans leur programme pédagogique.
Le
contact avec les étudiants comme avec les enseignants est actuellement
plus de l’ordre de la découverte et de
l’exploration. Selon les dernières estimations, seuls 3% des
étudiants en université utilisent aujourd’hui une tablette tactile.
C’est
un fait, les étudiants passent aujourd’hui un temps considérable, à
titre personnel, devant des
écrans, depuis leur smartphone jusqu’à leur ordinateur portable.
Néanmoins, selon un récent sondage, 75% des étudiants universitaires
préfèreraient encore et de loin les livres traditionnels
imprimés à leurs pendants numériques. Par ailleurs, d’après le
projet américain de recherche en cours Student Attitudes Toward Content in Higher Education réalisée par le
BISG
(Book
Industry Study Group), moins de 20% des enseignants
utiliseraient les derniers supports et contenus d’enseignement à
leur disposition pour dispenser leur cours. Ainsi, alors que le
potentiel de supports numériques à leur disposition est de plus en
plus vaste et facile d’accès, les enseignants préfèrent encore opter
pour une combinaison de supports différents, souvent un peu datés, et
avec toujours une préférence pour les supports
traditionnels imprimés.
Les éditeurs investissent dans les technologies numériques
De
leur côté, les grands éditeurs ont investis assez tôt et avec
intelligence dans les nouvelles technologies en
multipliant les partenariats avec des prestataires de services
d’édition numérique afin d’optimiser l’édition combinée de livres
d’enseignement en version traditionnelle comme en version
numérique.
Les
premières technologies XML couplées à des formats éditoriaux numériques
innovants, ont permis aux éditeurs de
créer des collections entières de supports d’enseignement pour tous
les âges, dorénavant à disposition à la fois en version traditionnelle
imprimée comme en version digitale.
Ils
ont développé de nouvelles méthodes permettant d’adapter et de
personnaliser le contenu aux besoins spécifiques
des étudiants, pour les cours individuels, les institutions et les
enseignants. Les éditeurs ont, par ailleurs, développé de nouveaux
algorithmes évolutifs et intelligents, permettant d’adapter
les cours au rythme des besoins et des progrès des étudiants.
Utilisé intelligemment et à bon escient, le recours à ces nouveaux
supports numériques permet d’optimiser les résultats, pour les
enseignants comme pour les étudiants que ce soit en ligne et à
distance ou dans le cadre de l’école ou de l’université.
Du point de vue des étudiants
Toutes
les études indiquent aujourd’hui que les supports traditionnels
imprimés ne répondent que partiellement aux
besoins réels des étudiants. Le rapport qualité/ prix est notamment
trop élevé pour justifier un recours unique à ces supports face à des
étudiants constamment à la recherche de supports
d’enseignement complémentaires ou alternatifs en version numérique.
Les
étudiants sont des consommateurs avisés, toujours à la recherche du
meilleur rapport qualité/ prix considérant
leur budget souvent limité. La majorité des étudiants achètent
eux-mêmes leurs livres de cours et parce que les éditions imprimées
traditionnelles, neuves comme d’occasion, sont souvent trop
chers pour leur budget, seuls 55% d’entre eux achètent la dernière
version à jour des ouvrages au programme de leur classe. Les autres
achètent soit des éditions plus anciennes, soit des éditions
d’autres pays, ou encore des versions en livre numérique (e-books)
moins onéreuses, voir souvent des copies frauduleuses disponibles sur
internet ou plus simplement les empruntent à la
bibliothèque. Leur comportement indique clairement qu’ils ne
perçoivent pas de réelle valeur ajoutée à acheter la dernière mise à
jour du contenu d’un cours, telle que proposée par les éditeurs
officiels. Le contenu des livres de cours s’est banalisé et il est
bien souvent accessible en un clic soit gratuitement soit à prix
plancher sur internet.
A
l’inverse, les étudiants qui ont recours à des supports numériques de
dernière génération comme Wiley Plus,
Pearson’s Mastering series ou McGraw Hill’s Connect, trouvent une
valeur ajoutée complémentaire immédiate et mesurable qui correspond
mieux à leurs attentes. Dans la dernière étude menée par le
BISG sur le sujet, ces nouvelles interfaces pédagogiques entièrement
numériques obtiennent systématiquement de meilleures notes d’évaluation
que les ouvrages classiques imprimés et ce, sur
l’ensemble des critères d’évaluation : simplicité, efficacité,
ergonomie, mémorisation, etc. Par contre, si les étudiants d’aujourd’hui
ont en effet une large préférence pour les éditions
multimédias, il doit être souligné qu’il s’agit bien des outils
interactifs de dernière génération. Les livres numériques
dits homothétiques, simples répliques au format PDF de leur livres
classiques n’ont, par contre, pas connu ce succès. Lors de la
précédente année scolaire, seuls 3% des étudiants ont acheté ce type de
livre numérique simple.
Du point de vue des enseignants
Nombre
d’écoles et d’universités expérimentent actuellement activement de
nouvelles méthodes et de nouvelles
technologies dans le but d’améliorer l’efficacité de leurs
programmes pédagogiques. Néanmoins, la plupart doivent faire face à des
problèmes budgétaires récurrents. Il s’agit aujourd’hui d’un
frein important, si ce n’est le plus important à l’acquisition de
supports numériques comme à la formation des enseignants qui souhaitent
passer le cap digital.
Si
les enseignants mesurent bien la valeur ajoutée que peuvent leur
apporter les nouvelles techniques d’enseignement
numériques, lorsqu’elles sont adaptatives et évolutives, ils ne
partagent pas pour autant toujours les mêmes objectifs que leurs
institutions de tutelles en termes de moyen pour y parvenir. Cette
divergence conjuguée à des charges de travail et des programmes
d’enseignements toujours plus pesants ne laissent que peu de temps et de
moyens aux enseignants pour se former et convertir leurs
supports et leurs méthodes au numérique.
Le défi actuel
La nécessaire évolution des esprits et de la volonté de faire évoluer les comportements tant du côté des enseignants
que des institutions est le principal défi à cette transition au tout numérique.
A
mesure que les nouvelles plateformes pédagogiques numériques se
développent et se perfectionnent, elles peuvent
être perçues comme un danger ou une menace, visant à terme à
remplacer ou estomper le rôle et la stature traditionnelle des
enseignants dans les écoles et les universités. Mais le temps que ces
nouvelles technologies pourraient permettre d’économiser aux
enseignants, notamment en ce qui concerne l’enseignement des savoirs
fondamentaux, pourrait et devrait être réinvestit et redéployé
pour explorer ou approfondir de nouveaux champs de connaissance avec
leurs étudiants. Le temps passé en classe pourrait ainsi être mieux
utilisé plutôt que remplacé, comme le craignent certains,
par des simulateurs de jeux ou des programme de e-learning dispensés
à distance via internet.
La
nouvelle génération d’étudiants, familière des nouvelles technologies,
est en constante recherche, à titre
personnel et en parallèle, de supports d’information numériques. Ils
comblent donc déjà naturellement et par eux-mêmes les lacunes du
système éducatif. Aussi, cette transition numérique sera, en
tout état cause, menée par les étudiants. La demande comme l’attente
est grande et l’offre tarde à se construire. Il paraît donc aujourd’hui
essentiel et urgent pour les institutions et les
éditeurs de travailler main dans la main pour passer le cap du
numérique et offrir de nouveaux outils plus performants aux étudiants
qui les attendent.
Que devrons-nous changer ?
Dans le monde digital, les changements de paradigme interviennent généralement suite à l’arrivée sur le marché et à
l’adoption généralisée par les usagers de nouvelles interfaces qui bousculent le jeu, les game changers, comme ont pu le faire récemment les smartphones ou les tablettes tactiles. Ces
dernières, pleines de promesses, semblent néanmoins encore trop récentes.
Les
tablettes ne sont pas encore aujourd’hui ni suffisamment puissantes et
développées ni suffisamment abordables en
terme de coût à l’achat pour constituer l’interface unique dont
pourraient rêver les enseignants et les étudiants. A ce stade, il va
falloir attendre encore quelques années, que les tablettes
accroissent leur puissance comme leurs champs d’applications, pour
qu’elles séduisent définitivement le monde enseignant. Le jour où la
majorité des étudiants auront à disposition une offre
intelligente, complète et abordable en termes d’interfaces comme de
contenus pédagogiques en version numérique, alors les enseignants et les
institutions pourront faire évoluer leur approche
pédagogique de manière efficace. Le mouvement semble irrémédiable.
La prochaine génération de solutions pédagogiques, encore à venir, sera en tout état de cause entièrement born
digital, c'est-à-dire conçue, pensée et créée à 100% par des
auteurs et des développeurs, issus de la nouvelle génération née avec
internet. Dans ce cadre, il parait clair que les programmes
et les méthodes pédagogiques devront être repensées intégralement,
avec une nouvelle approche, qui ne pourra pas être un simple transfert,
sorte de copier/coller du papier vers le numérique des
méthodes et supports préexistants. Leur design sera modulable,
adaptable et personnalisable comme le propose par exemple déjà la
plateforme Cengage’s new Mindtap. Ces nouveaux programmes
d’enseignement auront toutes les caractéristiques du nouveau
paradigme numérique : mobile, social, personnalisable, interactif,
évolutif, etc.
Dans
ce contexte, les éditeurs doivent également repenser intégralement leur
organisation et adapter leurs processus
de fabrication. Le groupe Jouve propose ainsi d’intégrer le
numérique de plus en plus tôt dans le processus éditorial, avec la
création en amont, de formats pivots qu’il est ensuite possible de
décliner de manière simple dans n’importe quel format final pour
n’importe quel support de lecture, numérique ou papier. L’édition papier
tendant, à terme, à devenir un support comme un autre aux
côtés des différents formats numériques. Ce processus permet
également de réduire les délais et les coûts de production, d’améliorer
les phases de relecture et d’intégrer des contributeurs
extérieurs.
Les
modèles d’affaires comme les canaux de distribution vont également
devoir changer de manière radicale. A mesure
que les éditeurs développeront et commercialiseront des plateformes
pédagogiques d’enseignement numériques plus sophistiquées et plus
performantes, ils devront abandonner de l’autre côté la
commercialisation de leurs supports traditionnels. Dans ce cadre, la
conversion des données et des connaissances traditionnelles en version
numérique aura un coût important que les éditeurs
devront, à un moment ou un autre et d’une manière ou d’une autre,
répercuter et refacturer aux écoles, aux universités et aux étudiants.
Les éditeurs et les universités expérimentent d’ailleurs
actuellement aux USA, un nouveau système de licence permettant de
repartir équitablement les coûts entre les parties avec une contribution
par élève. L’Université de l’état de l’Indiana aux
Etats-Unis fait partie des structures pilotes actuellement en test
sur ces nouveaux systèmes. L’un des autres avantages majeur de cette
nouvelle relation dématérialisée consistera également à
supprimer tous les intermédiaires et permettra aux éditeurs et aux
étudiants de développer et d’entretenir un dialogue direct, personnel et
en temps réel pour une personnalisation intégrale des
supports et des services. Ce sera la fin des standards.
En conclusion
La
révolution numérique poursuit son cours et s’accélère. Basée sur les
dernières innovations technologiques telles
que le XML, le HTML5 et le nouveau format EPub3, les interfaces
mobiles deviennent tous les jours plus performantes prenant également un
nouvel élan à partir des dernières ressources offertes par
le cloud computing. Les nouveaux programmes pédagogiques numériques
(e-learning) deviennent plus intelligents et autonomes. Ils sont
adaptables, personnalisables et évolutifs. Basés sur de
puissants algorithmes, les nouvelles interfaces pédagogiques
deviennent multimédias et entièrement interactives. Créant un dialogue
permanent avec leur utilisateur, ces programmes permettent de
questionner et d’évaluer en permanence les lacunes comme les acquis
des étudiants pour leur proposer des exercices et des programmes
individualisés. Les enseignants pourront donc adapter, mettre
à jour et faire évoluer leur enseignement de manière efficace et en
temps réel en allant puiser dans des ressources ouvertes de manière
quasi-illimitée.
Aujourd’hui,
la plupart des technologies nécessaires et utiles à cette transition
numérique de nos systèmes
d’enseignement, existe ou sera rapidement à disposition et les
élèves eux même sont déjà prêts et même impatients. La prochaine étape
est donc celle de l’évolution nécessaire des mentalités et
pratiques traditionnelles.
Emmanuel Benoit, directeur marketing et communication, Groupe Jouve
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