lundi 18 juillet 2011

Hervé Maurey, sénateur : "Le modèle de la fibre optique en zones peu denses ne fonctionne pas"

par Olivier Chicheportiche, ZDNet France. Publié le 12 jui 2011
Tags: Fibre optique, Législation,
Stratégie - L'élu Nouveau Centre tire à nouveau le signal d'alarme et estime que la France est en train de rater le virage du très haut débit. Selon lui, il faut que l'Etat reprenne le dossier en main pour changer les règles du jeu.
Malgré le discours ambitieux du gouvernement et l'autosatisfaction des opérateurs, la perspective de voir la France couverte à 100% en fibre optique est plombée par la réalité du marché.
Si dans les zones denses, le problème du financement ne se pose pas (les opérateurs supportant 100% des investissements), ailleurs, le budget est loin d'être bouclé. Car dans les zones peu denses ou rurales, rien n'oblige les opérateurs à fibrer, il faut dire que le retour sur investissement est loin d'être garanti.
Surtout, le modèle de financement public-privé n'est pas efficace. Concrètement, sur un total de 23,5 milliards d'euros pour fibrer 98% des foyers, les besoins publics sont de 12,9 milliards sur 15 ans, soit 860 millions d'euros par an.
L'Etat doit alimenter un fonds tiré du grand emprunt à hauteur de 750 millions. Ensuite, les collectivités devraient investir au minimum 150 millions d'euros par an, auxquels s'ajoutent 50 millions par an de la part de l'Europe. Le calcul est simple, il reste à trouver 660 millions par an.
"Il n'y pas de pilote dans l'avion"
"Or le compte n'y est pas", s'alarme Hervé Maurey, sénateur Nouveau Centre de l'Eure. En 2010, le parlementaire rendait déjà un rapport sur la question s'inquiétant de cette problématique. Près de 9 mois plus tard, la situation n'a pas évolué.
"La France est en train de rater le virage du très haut débit. Si on ne fait rien, ce retard sera irréversible", poursuit-il dans un rapport d'information présenté ce mardi.
Le sénateur dénonce le manque d'écoute du gouvernement et du régulateur des télécoms. "Les propositions que j'ai faites n'ont pas trouvé beaucoup d'écho auprès de l'Arcep. Par ailleurs, le dossier implique trop de ministres qui ont des problèmes de court terme urgents à régler. Il n'y pas de pilote dans l'avion".
Surtout, Hervé Maurey estime que la situation financière du projet s'est encore dégradée : "Le fonds d'aménagement numérique du territoire n'est toujours pas abondé".
Et de lister ses propositions de 2010 pour trouver des pistes de financement : exploiter une partie de la hausse de la TVA sur les abonnements triple play, augmenter légèrement les abonnements, utiliser les fonds destinés au renouvellement du réseau cuivré...
Reste que c'est tout le modèle qui est remis en cause. "Selon moi, le dispositif actuel n'est pas pertinent. Dans un ou deux ans, un bilan s'imposera et débouchera sur une alternative. Comment les zones peu denses pourraient-elles être couvertes alors que les opérateurs n'ont aucune obligation d'y aller ?", s'interroge-t-il.
S'inspirer des sociétés d'autoroute
Pragmatique, l'élu estime que certaines mesures peuvent rendre le cadre actuel plus efficace. "On peut obliger les opérateurs à prendre des engagements, établir des contractualisations par département. Et, dans le même temps, élargir le pouvoir de sanction du régulateur en cas de manquements".
"Mais on risque bien de se rendre à l'évidence. Alors pourquoi s'entêter dans un modèle qui n'est pas efficace ?"
Les propositions sont multiples. Hervé Maurey demande d'abord que l'Etat reprenne en main le dossier. Ensuite, "les solutions alternatives existent. On peut ainsi imaginer un modèle à l'australienne avec une société publique unique réunissant opérateurs, collectivités et financiers. On peut également reprendre le système des autoroutes".
Explication : les déploiements seraient confiés à des entreprises du BTP "pour qui les questions de retour sur investissements à long terme ne posent pas de problème, contrairement aux opérateurs télécoms". Ces acteurs pourraient alors louer leurs concessions aux opérateurs.
Le sénateur souhaite se faire entendre. Une proposition de loi, reprenant l'essentiel de ses propositions, notamment l'engagement contractuel des opérateurs, sera déposé à la rentrée. Ses chances d'être adoptée sont néanmoins assez minces.
Mais Hervé Maurey pourra compter sur un allié inhabituel : le Parti Socialiste souhaite également, s'il revient au pouvoir, remettre en cause le dispositif actuel. Bref, la fibre pour tous, ce n'est pas pour demain.

http://www.zdnet.fr/actualites/herve-maurey-senateur-le-modele-de-la-fibre-optique-en-zones-peu-denses-ne-fonctionne-pas-39762446.htm#xtor=EPR-100

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