Le 09 juin 2011 (09:28) - par Valery Marchive
IPv6 : enfin le temps des projets ?
Le monde n’est pas en avance. Si l’on parle régulièrement d’IPv6 depuis près d’une décennie, le successeur de l’indéboulonnable IPv4 n’est encore qu’une réalité balbutiante. La journée mondiale d’IPv6 est là pour le montrer : les géants des réseaux que sont Google, Facebook, Akamai, ou encore Cisco et D-Link se prépare à une journée de test d’intéropérabilité grandeur nature. Plus de 400 sites Web participent. Orange se vante d’avoir anticipé en s’attaquant dès 2008 au sujet. Mais son réseau mobile ignore encore tout d’IPv6.
A la décharge de l’opérateur, il convient de souligner que son cas est loin d’être isolé. Et que la responsabilité de cette latence est peut-être à chercher du côté des clients, et en particulier les entreprises. Nicolas Scheffer, responsable infrastructure IPv6 chez Cisco France, reconnaît volontiers que si l’équipementier supporte IPv6 dans ses produits depuis 2003, la parité fonctionnelle avec IPv4 n’est pas encore là : «oui, il reste beaucoup de travail à faire. Mais on développe des fonctions pour répondre aux besoins de nos clients...» Et justement, de leur côté, l’heure n’est pas à la précipitation. Selon Infoblox, une majorité d’entreprises IT ne sont pas prêtes pour IPv6 : à 80 %, elles estiment manquer de connaissance pour mener à bien la transition; 41 % des 2400 entreprises sondées pour l’étude «évaluent leur préparation derrière celle des concurrents.» Il faut dire que la modernité ne semble pas vraiment au rendez-vous : «41 % suivent les adresses IP manuellement avec des feuilles de calcul.» Aux Etats-Unis, selon CompTIA, la situation n’est guère plus brillante : seules 24 % des DSI auraient commencé à implémenter IPv6.
Sans forcer l’optimisme, Nicolas Scheffer est tout de même rassurant : «le nombre de réseaux IPv6 qui s’annoncent sur Internet croît de manière exponentielle depuis 18 mois, même s’il reste faible.» Et l’on commencerait même à travailler à de premiers projets concrets et non plus seulement des pilotes ou des proof of concept. Bref, selon lui, «il y a une vraie prise de conscience des enjeux.» L’assèchement des réserves d’adresses IPv4 pour la région Apac, en début d’année, a peut-être donné le signal d’alarme qui manquait : «c’est un peu comme lors du passage à la numérotation à 10 chiffres, en France. Ne pas s’y mettre, c’est prendre le risque de se couper du monde,» explique Nicolas Scheffer, soulignant au passage qu’en Asie, «on voit déjà des projets exclusivement IPv6.»
Alors certains pourraient être tentés de s’en remettre aux systèmes transitoires de tunneling entre les deux mondes : «mais il a un vrai problème de performances et nombre de cessions concurrentes possibles. Sans compter qu’une passerelle 6to4 peut faire une belle cible, attirante, pour une attaque.»
Mais le chemin de la migration promet d’être long et semé d’embuches. En France, Free a longtemps eu l’image du bonne élève, vertueux, en proposant très tôt IPv6 à ses clients dégroupés. «Mais quand on active IPv6 sur sa Freebox, son PC se retrouve généralement tout nu sur Internet,» explique Nicolas Scheffer. Oui : la configuration des outils de sécurité pour IPv4 ne recouvre pas forcément les flux IPv6... «Nous avons gros travail d’éducation à faire, là.» D’autant plus que la transition semble partie pour se faire largement avec mise en oeuvre des deux piles réseau : IPv4 et IPv6 - «il faudra gérer les deux, pendant longtemps» Ça, c’est pour la bonne pratique, sur le papier.
La mise en oeuvre promet d’être largement plus subtile et complexe car il faudra, en outre, tenir compte des compatibilités applicatives. Un véritable casse-tête. D’ailleurs, Nicolas Scheffer le constate : «l’évaluation de l’infrastructure chez le client, et la formulation de recommandations sur mesure pour passer à IPv6... c’est là que l’on est le plus débordé.»
http://www.lemagit.fr/article/ipv6-ipv4/8913/1/ipv6-enfin-temps-des-projets/?utm_source=essentielIT&utm_medium=email&utm_content=new&utm_campaign=20110718&xtor=ES-6
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