A lire sur: http://www.zdnet.fr/actualites/gouvernance-de-l-internet-la-bataille-s-ouvre-a-duba-39785025.htm#xtor=EPR-100
Retour sur les faits
Ce lundi débute à Dubaï la Conférence mondiale des télécommunications internationales (CMTI ou WCIT en anglais). Elle doit durer jusqu'au 14 décembre, et selon ses organisateurs, "fera date" dans l'histoire de l'Internet.
Car son enjeu est fixé depuis des mois : l'Union internationale des télécoms (UIT) souhaite pour une part non négligeable de ses membres réviser le Règlement des télécommunications internationales (RTI), traité qui régit la gouvernance de l'Internet depuis 1988.
Mais si l'enjeu est clair, difficile de voir qui le défend. Un brouillon de proposition de règlement se construit de jour en jour, mais le tout reste assez opaque : quelles sont les propositions faites par les Etats prises en compte, et de quelle manière ?
Selon la procédure interne à l'UTI, les 193 Etats membres avaient jusqu'au 3 novembre dernier pour soumettre leurs propositions. Le secrétariat général de l'UTI a réalisé ensuite une synthèse pour produire un document destiné à être débattu lors de l'assemblée de Dubaï.
Quels changements de gouvernance ?
Evidemment, il nous faudra pour l'heure nous contenter du projet en cours, à l'état de brouillon, qui ne présage pas exactement de l'issue des négociations en cours. Mais sur la base de ce projet de RTI, voici les changements qui pourraient être apportés à la gouvernance internationale de l'Internet.
Tout ceci mérite d'être examiné et questionné au cours des prochains jours. Il n'est pas certain que les propositions faites par certains Etats ou groupes d'influence (Etno, l'association des opérateurs européens, notamment) soient retenues dans le traité final.
Les opposants au projet
Car évidemment, il faudra compter sur les positions des opposants au projet, qu'ils soient partie prenante de la négociation, ou qu'ils se soient constitués comme groupe de pression auprès des négociateurs.
Etats-Unis et associations se retrouvent par exemple sur la critique des propositions, même si ces associations de défense des libertés en ligne ou de l'Internet ouvert ne perdent généralement pas de vue les intérêts défendus par les Etats-Unis.
Se plaçant lui-même sur le plan des libertés et de l'ouverture de l'Internet, Google défend sa position fermement en prenant à parti ses utilisateurs. D'autres éditeurs, généralement vus comme plus légitimes sur ces questions, font front contre les propositions de l'UIT. C'est le cas de Mozilla, par exemple.
Même l'OCDE critique le point de vue des opérateurs, très largement repris dans le projet de l'UIT, en estimant que d'un point de vue économique et de l'innovation, le modèle proposé est tout simplement "inefficace."
Autant de prises de positions qui n'ont pas échappé au monde politique. Il y a une dizaine de jours, c'est le Parlement européen lui-même qui a pris position contre le projet de règlement tel qu'il est rédigé actuellement. Propositions dangereuses, absence de légitimité de l'UIT, manque de transparence et d'ouverture des négociations.
Les éléments de langage se sont d'ailleurs bien dispersés chez les opposants : partout, on parle de "rencontre à huis-clos" pour dénoncer l'opacité, on rappelle que "personne n'est propriétaire de l'Internet", on insiste sur le statut de "traité fondateur" du traité de Melbourne en 1988, et on se remémore par avance à quel point c'était bien, l'Internet, avant que les opérateurs, ces "renards dans un poulailler", se mettent en tête de réguler la chose.
Demandez le programme !
Ces prochains jours seront l'occasion d'une bataille rangée, directe ou par négociateurs interposés, entre le tenants d'une régulation multilatérale et les défenseurs, parfois par défaut, du système actuel.
Et ils ont beau dénoncer l'opacité et le huis-clos attachés aux négociations, ceux-ci n'en disposent pas moins d'alliés importants au sein de la conférence. Les Etats-Unis, on l'a dit, mais aussi le gouvernement australien par exemple qui, comme l'explique ZDNet USA, s'oppose à tout transfert de gouvernance.
La position de l'Europe sera également à surveiller. L'Europarlement a voté une directive en ce sens. Elle n'engage pas les Etats directement, mais selon l'une de ses architectes, l'eurodéputée pirate Amelia Andersdotter, "elle pourra avoir un impact politique important."
Dans une interview qu'elle nous a accordée, la députée européenne du Parti pirate suédois explique que "la résolution dépend de l'attitude des négociateurs : est-ce qu'ils considèrent l'Union européenne comme légitime ou non ?"
L'avenir dira si la députée européenne a raison ou non. Ce qui est sûr, c'est que le soutien des Etats-membres de l'Union européenne semble acté, si l'on en croit les déclarations diverses recueillies par l'agence de presse Reuters. La même dépêche rappelle qu'outre les Etats-Unis et l'Australie, on retrouve sur une ligne équivalente le Canada, la Nouvelle-Zélande, le Mexique, et d'autres membres de l'UIT.
Le brouillon de la synthèse est disponible sur le site de l'UIT. Le voici dans sa version non-définitive, telle que disponible à l'heure où nous écrivons ces lignes :
Brouillon de la proposition de règlement de l'UIT
Pour les utilisateurs lambda de l'Internet que nous sommes, il ne reste plus qu'à attendre et tenter de suivre au mieux les débats. Pour ce faire, plusieurs ressources pourraient être intéressantes :
Réglementation : C'est aujourd'hui
que débute la conférence WCIT à Dubaï. La bataille pour la gouvernance
de l'Internet va s'y jouer jusqu'au 14 décembre. Les Etats et
organisations ont déjà commencé à creuser les tranchées.
"A partir de 1973, quand mes collègues et moi avons
proposé la technologie derrière l'Internet, nous avons plaidé pour un
standard ouvert pour connecter les réseaux informatiques ensemble. Ce
n'était pas simplement philosophique ; c'était aussi pratique."
Vint Cerf, co-inventeur du protocole TCP/IP avec Bob Kahn, a le sens de la formule pour combattre ce qu'il considère dans un blog Google – son employeur – comme la volonté de "réguler l'Internet." Ce "père de l'Internet" défend des intérêts bien compris, ceux de Google, mais il est influent, et loin d'être le seul à s'opposer aux volontés de l'UIT.Retour sur les faits
Ce lundi débute à Dubaï la Conférence mondiale des télécommunications internationales (CMTI ou WCIT en anglais). Elle doit durer jusqu'au 14 décembre, et selon ses organisateurs, "fera date" dans l'histoire de l'Internet.
Car son enjeu est fixé depuis des mois : l'Union internationale des télécoms (UIT) souhaite pour une part non négligeable de ses membres réviser le Règlement des télécommunications internationales (RTI), traité qui régit la gouvernance de l'Internet depuis 1988.
Mais si l'enjeu est clair, difficile de voir qui le défend. Un brouillon de proposition de règlement se construit de jour en jour, mais le tout reste assez opaque : quelles sont les propositions faites par les Etats prises en compte, et de quelle manière ?
Selon la procédure interne à l'UTI, les 193 Etats membres avaient jusqu'au 3 novembre dernier pour soumettre leurs propositions. Le secrétariat général de l'UTI a réalisé ensuite une synthèse pour produire un document destiné à être débattu lors de l'assemblée de Dubaï.
Quels changements de gouvernance ?
Evidemment, il nous faudra pour l'heure nous contenter du projet en cours, à l'état de brouillon, qui ne présage pas exactement de l'issue des négociations en cours. Mais sur la base de ce projet de RTI, voici les changements qui pourraient être apportés à la gouvernance internationale de l'Internet.
Tout ceci mérite d'être examiné et questionné au cours des prochains jours. Il n'est pas certain que les propositions faites par certains Etats ou groupes d'influence (Etno, l'association des opérateurs européens, notamment) soient retenues dans le traité final.
Les opposants au projet
Car évidemment, il faudra compter sur les positions des opposants au projet, qu'ils soient partie prenante de la négociation, ou qu'ils se soient constitués comme groupe de pression auprès des négociateurs.
Etats-Unis et associations se retrouvent par exemple sur la critique des propositions, même si ces associations de défense des libertés en ligne ou de l'Internet ouvert ne perdent généralement pas de vue les intérêts défendus par les Etats-Unis.
Se plaçant lui-même sur le plan des libertés et de l'ouverture de l'Internet, Google défend sa position fermement en prenant à parti ses utilisateurs. D'autres éditeurs, généralement vus comme plus légitimes sur ces questions, font front contre les propositions de l'UIT. C'est le cas de Mozilla, par exemple.
Même l'OCDE critique le point de vue des opérateurs, très largement repris dans le projet de l'UIT, en estimant que d'un point de vue économique et de l'innovation, le modèle proposé est tout simplement "inefficace."
Autant de prises de positions qui n'ont pas échappé au monde politique. Il y a une dizaine de jours, c'est le Parlement européen lui-même qui a pris position contre le projet de règlement tel qu'il est rédigé actuellement. Propositions dangereuses, absence de légitimité de l'UIT, manque de transparence et d'ouverture des négociations.
Les éléments de langage se sont d'ailleurs bien dispersés chez les opposants : partout, on parle de "rencontre à huis-clos" pour dénoncer l'opacité, on rappelle que "personne n'est propriétaire de l'Internet", on insiste sur le statut de "traité fondateur" du traité de Melbourne en 1988, et on se remémore par avance à quel point c'était bien, l'Internet, avant que les opérateurs, ces "renards dans un poulailler", se mettent en tête de réguler la chose.
Demandez le programme !
Ces prochains jours seront l'occasion d'une bataille rangée, directe ou par négociateurs interposés, entre le tenants d'une régulation multilatérale et les défenseurs, parfois par défaut, du système actuel.
Et ils ont beau dénoncer l'opacité et le huis-clos attachés aux négociations, ceux-ci n'en disposent pas moins d'alliés importants au sein de la conférence. Les Etats-Unis, on l'a dit, mais aussi le gouvernement australien par exemple qui, comme l'explique ZDNet USA, s'oppose à tout transfert de gouvernance.
La position de l'Europe sera également à surveiller. L'Europarlement a voté une directive en ce sens. Elle n'engage pas les Etats directement, mais selon l'une de ses architectes, l'eurodéputée pirate Amelia Andersdotter, "elle pourra avoir un impact politique important."
Dans une interview qu'elle nous a accordée, la députée européenne du Parti pirate suédois explique que "la résolution dépend de l'attitude des négociateurs : est-ce qu'ils considèrent l'Union européenne comme légitime ou non ?"
"Nous
avons une déclaration politique qui est forte, et beaucoup de députés
européens la soutiennent. Après, toute la question repose sur les
Etats-membres et la Commission européenne : cela dépendra s'ils ont
l'intention de suivre les recommandations du Parlement européen. Il me
semble qu'en ce sens nous faisons des propositions fortes sur la
gouvernance de l'Internet et les questions qui s'y rapportent. Mon
sentiment, c'est que les Etats et la Commission voudront suivre la ligne
adoptée par la résolution." Amelia Andersdotter - eurodéputée pirate
Quelques ressources pour suivre les débatsL'avenir dira si la députée européenne a raison ou non. Ce qui est sûr, c'est que le soutien des Etats-membres de l'Union européenne semble acté, si l'on en croit les déclarations diverses recueillies par l'agence de presse Reuters. La même dépêche rappelle qu'outre les Etats-Unis et l'Australie, on retrouve sur une ligne équivalente le Canada, la Nouvelle-Zélande, le Mexique, et d'autres membres de l'UIT.
Le brouillon de la synthèse est disponible sur le site de l'UIT. Le voici dans sa version non-définitive, telle que disponible à l'heure où nous écrivons ces lignes :
Brouillon de la proposition de règlement de l'UIT
Pour les utilisateurs lambda de l'Internet que nous sommes, il ne reste plus qu'à attendre et tenter de suivre au mieux les débats. Pour ce faire, plusieurs ressources pourraient être intéressantes :
- Les actualités que nous ne manquerons pas de publier
- Le site de l'association Internet Society (anglais)
- Le site de l'association Center for Digital Democracy (anglais)
- Le blog Falkvinge.net (anglais)
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- Le fil dédié à l'événement du Monde
- Le site de fuites de documents sur la CMTI WCITleaks.org (anglais)
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