A lire sur: http://www.zdnet.fr/actualites/prix-de-l-offre-legale-simple-pretexte-ou-appel-au-piratage-39789615.htm
Débat : Si 61% des
consommateurs jugent l’offre légale de biens culturels dématérialisés
satisfaisante, ils sont nombreux à lui reprocher ses prix trop élevés,
en particulier dans la catégorie des films et des logiciels (82%).
Combattre le téléchargement pirate sans étudier en profondeur
les failles de l’offre légale qui poussent les consommateurs à frauder
serait bien mal avisé de la part de l’Hadopi. C’est pourquoi, le
Département Recherche, Etudes et Veille (DREV) a mis en place un baromètre,
permettant de mieux caractériser la perception publique de l’offre
légale dématérialisée de biens culturels. Voici les grandes lignes de
cette étude, menée auprès d’un échantillon significatif de 1 500
internautes de quinze ans et plus.
Tout d’abord,
l’étude révèle que 71% des internautes consomment au moins une des
catégories de biens culturels étudiés, avec une consommation nettement
plus importante chez les 15-24 ans (96%) mais également plus diversifiée
(4,1 catégories différentes contre 2,2 en moyenne).
Dans
l’ensemble, les consommateurs sont plutôt satisfaits de l’offre légale :
61% de ceux qui déclarent la connaître. Cependant, deux catégories
tombent un peu en dessous de cette moyenne : les séries TV (56%) et les
films (52%), plus touchés par le téléchargement illégal.
Une offre satisfaisante mais onéreuse
Au sein de cette offre légale, les internautes considèrent que les logiciels, jeux vidéos et vidéo clips sont les plus faciles à trouver (80%), alors que l’offre de séries TV leur apparaît plus difficile d’accès (62%).
L’offre légale de jeux-vidéos
s’illustre comme la plus riche en contenu (78%), par opposition à celle
des séries TV, jugée la moins diversifiée (61%). Dans l’ensemble, les
utilisateurs se déclarent très satisfaits de la qualité technique des
produits proposés. 79% affirment qu’elle est de bonne ou de très bonne
facture.
Concernant le degré de nouveauté, la gagnante
est l’offre de musique et de clips que 72% des utilisateurs jugent «
récente », et les perdantes sont les séries TV que seuls 55% des
utilisateurs jugent alimentées régulièrement.
Mais
c’est quand l’étude aborde le sujet du prix que les consommateurs
grincent. Que ce soit pour la musique, les films, les séries, les
photos, jeux vidéos, livres ou logiciels, les utilisateurs affirment que
les produits sont trop chers. Ceci est vrai en particulier pour les
films et les logiciels qualifiés de chers pour 82% des utilisateurs.
A
partir de cette étude a été tiré un « indice composite d’attractivité
de l’offre légale dans son ensemble » de 60%, plutôt homogène entre les
catégories, même si les séries TV et les films sont un peu à la traine
(58 et 57%).
« Ceux qui piratent le plus sont également ceux qui achètent le plus »
Si cette étude a été effectuée, c’est essentiellement pour tenter de comprendre les failles de l’offre légale qui poussent les consommateurs à télécharger illégalement.
Philippe Aigrain, l’un des fondateurs de la Quadrature du net,
une association de défense des droits et libertés des citoyens sur
Internet remet en cause tout d’abord la méthodologie utilisée pour
effectuer cette étude : « L’étude est faussée. Le DREV ne définit pas ce
qu’il entend précisément par offre légale et exclut les personnes qui
ont affirmé connaître l’existence de l’offre légale sans savoir
précisément de quoi il s’agit. ».
Il ajoute : « Ils
ont également pris le parti d’inclure des internautes ayant des usages
licites ou/et illicites en omettant les statistiques sur les différences
d’appréciations en fonction des différents profils. Par exemple il
n’est pas mentionné que ceux qui piratent le plus sont également ceux qui achètent le plus. ».
Si
beaucoup d’internautes qui téléchargent illégalement justifient leur
acte en affirmant, comme l’étude le rappelle, que l’offre légale est
trop chère, Philippe Aigrain soutient que l’offre qualifiée aujourd’hui
de pirate devrait tomber dans le domaine légal. Celui-ci défend « la
légitimité du partage non marchand entre personnes. » et ceci pour deux
raisons.
Tout d’abord il affirme : « qu’il s’agit d’un
droit fondamental qui participe du principe de culture et interdire
cette transmission sur le net est une véritable régression. Personne ne
s’est jamais inquiété que les livres physiques passent de mains en
mains. ».
Ensuite, dans son ouvrage « Sharing, Culture and the Economy in the internet Age », il met en avant des études qui démontrent que le téléchargement sur internet a en réalité un impact limité sur les ventes légales :
«
Par exemple il a été démontré qu’au maximum 20% de la chute des ventes
de la musique enregistrées est imputable au piratage. J’explique cette
baisse plutôt par la réduction de l’offre de titres qui est passée de 6 000 à 1000 albums par an. ».
Enfin,
selon le fondateur de la Quadrature du net, la grande absente de
l’étude est la concentration actuelle des ventes et de la distribution,
qui met en valeur une minorité de best sellers ou de block busters.
Selon lui, légaliser les offres pirates permettrait de favoriser une
plus grande diversité d’œuvres et aurait en définitive un impact positif
sur d’autres composantes du marché. Il évoque notamment : « la
revalorisation de la consommation culturelle en tant qu’expérience
sociale telle que la fréquentation de salles de cinéma ou de concerts.
».
« C’est cher mais si nous baissons les prix, l’industrie ne sera plus rentable »
Ce n’est pas l’avis de Pascal Lechevallier, bloggeur chez ZDNet.fr et fondateur de TF1 Vision,
qui considère « que l’offre illégale crée une véritable concurrence
déloyale face à l’offre légale. ». Celui-ci répond à l’argument
communément utilisé par les pirates qui affirment que la chronologie des
médias ne permet pas d’avoir accès immédiatement, par exemple, aux
séries américaines :
« Cet argument est irrecevable,
les grandes séries sont disponibles six heures après leur diffusion pour
1,99€ par épisode sur des plateformes comme iTunes, Orange ou
CanalPlay. Il est également possible de payer un abonnement au mois
entre 6,99€ et 9,99€ par mois par exemple chez CanalPlay. ». Il
s’insurge : « Le téléchargement pirate est une pratique irresponsable et
illégale qui résulte d’une profonde incompréhension de la valeur des
produits culturels. Si tout le monde abandonnait définitivement l’offre
légale, l’industrie péricliterait. ».
Il réagit à la
statistique démontrant que les consommateurs considèrent l’offre légale
trop chère : « Si vous demandez à n’importe qui si l’essence est trop
chère, tout le monde vous répondra que oui mais tout le monde paie parce
qu’il n’existe pas d’offre parallèle gratuite. Certes c’est cher mais
si nous baissons les prix, l’industrie ne sera plus rentable. ».
Enfin,
il affirme qu’il serait possible de baisser les prix si le niveau de la
consommation augmentait mais la consommation de séries est stable et
une partie du volume est cannibalisée par l’offre pirate :
«
Si plus de consommateurs se tournaient vers l’offre légale, le volume
de consommation augmenterait et il serait alors possible de baisser les
prix, ce qui arrangerait tout le monde mais avec le piratage, c’est
économiquement impossible. ».
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