A lire sur: http://www.zdnet.fr/actualites/le-nouvel-age-digital-l-ouvrage-futurologue-des-leaders-de-google-fait-polemique-39791083.htm
Internet : Cet ouvrage rédigé par
Eric Schmidt et Jared Cohen, défend la théorie selon laquelle internet
permettrait de faire régner le bien commun. La polémique est ouverte.
C’est une tribune assassine que Julien Assange, le rédacteur en chef
de Wikileaks reclus dans l’Ambassade de l’Equateur à Londres, a publié
au sujet de l’ouvrage futurologue « The new digital age : reshaping the
future of people, nations and business ».
Ce traité, né sous la plume d’Eric Schmidt (président de Google) et de Jared Cohen (géopoliticiens des secrétaires d’Etat américain et actuellement directeur de Google Ideas, le think thank de Google), conçoit l’avenir d’un monde où les 5 milliards d’êtres humains non connectés viendraient enfin se joindre au festin numérique.
La société « tous connectés » serait-t-elle meilleure ?
Un livre engagé, teinté d’un angélisme stratégique selon le Financial Times, qui s’est empressé de nuancer la vision prismatique des mastodontes. Pour le quotidien financier : « l’ouvrage pourrait être résumé en une phrase « En règle générale, la connectivité encourage et permet les comportements altruistes. » ». Ainsi la conclusion explicite est la suivante : « La meilleure chose qui pourrait être faite pour améliorer la qualité de vie des gens (…) est de leur permettre une plus grande connectivité ».
Ce traité, né sous la plume d’Eric Schmidt (président de Google) et de Jared Cohen (géopoliticiens des secrétaires d’Etat américain et actuellement directeur de Google Ideas, le think thank de Google), conçoit l’avenir d’un monde où les 5 milliards d’êtres humains non connectés viendraient enfin se joindre au festin numérique.
La société « tous connectés » serait-t-elle meilleure ?
Un livre engagé, teinté d’un angélisme stratégique selon le Financial Times, qui s’est empressé de nuancer la vision prismatique des mastodontes. Pour le quotidien financier : « l’ouvrage pourrait être résumé en une phrase « En règle générale, la connectivité encourage et permet les comportements altruistes. » ». Ainsi la conclusion explicite est la suivante : « La meilleure chose qui pourrait être faite pour améliorer la qualité de vie des gens (…) est de leur permettre une plus grande connectivité ».
Rappelons qu’Eric Schmidt
tweetait le message suivant le 13 avril : « Pour chaque personne
connectée, il y en a deux qui sont déconnectées. A la fin de la
décennie, tout le monde sur Terre sera connecté. ». D’après les rumeurs,
le Google X Lab testerait une méthode audacieuse qui consisterait à
envoyer des ballons surplombés d’antennes large bande dans la
stratosphère et qui permettrait potentiellement d’un jour équiper
l’ensemble de la planète.
C’est sur le
détournement d’internet à des fins autoritaires que les deux gourous
mettent en garde les lecteurs. Ceux-ci dressent un scénario
apocalyptique où des Etats voyous s’allieraient pour créer leurs propres
réseaux qui mèneraient à balkanisation de l’internet, où certains pans
de la toile ne seraient pas régis par des principes de liberté et de
protection des données.
Une vision teintée d’optimisme
Mais
cela n’a pas lieu d’altérer leur assurance optimiste : « Pour chaque
effet négatif d’internet, il y aura une réponse substantiellement
positive qui viendra contrecarrer cet effet. ». La grande thèse du livre
reste que l’expressivité permise par internet va dans le sens de la
défense du bien commun, et du règne de la rationalité collective : « Les
gens qui tenteront de nourrir des mythes autour de la religion, la
culture ou les ethnies vont devoir se battre pour maintenir un discours
cohérent face au flux d’auditeurs mieux informés que jamais ».
Même
si des régimes comme la Chine, et sa Grande Muraille numérique, tentent
d’imposer une certaine censure, ceux-ci soutiennent que l’information,
semblable à l’eau qui coule, trouvera toujours un moyen de s’insinuer
au-delà des barrières poreuses. L’ouvrage s’appuie également sur
l’exemple du printemps arabe, notamment en Egypte en 2011, où les
réseaux sociaux ont « électrifié le mouvement de protestation » et «
rameuté tellement des gens furieux dans les rues. ».
Cependant
cette prise de position forte ne saurait se désengluer du conflit
d’intérêt évident dont sont emprunts les deux leaders. Julien Assange s’insurge contre
cette vision biaisée de deux exécutifs qui incarnent une fusion
malsaine entre le nerf d’internet, la Silicon Valley, et l’Etat
américain tout puissant qui s’impose par son « soft power ».
Pour
le fondateur acide de Wikileaks: « Le livre fait la propagande du rôle
de la technologie dans le remodelage des peuples du monde et de ses
nations en ersatz de la superpuissance dominante mondiale, qu’ils
veuillent se faire remodeler ou non. ».
Ce qu’Eric
Schmidt et Jared Cohen nommeraient « progrès », loin d’être ce que
Julien Assange défend – la correction de l’asymétrie d’information entre
les pouvoirs publics et les citoyens – n’est en réalité que la
contagion d’une idéologie résolument états-unienne à l’ensemble du
globe.
Chaque jour, un million d’appareils mobiles connectés à Google sont activés. Julien Assange insiste sur la question évitée par Google tout au long du manifeste : que va faire Google avec toutes les données collectées sur des milliards d’utilisateurs ? Cela permettra-t-il un meilleur contrôle des populations débilitées sous prétexte d’assurer leur sécurité ?
Chaque jour, un million d’appareils mobiles connectés à Google sont activés. Julien Assange insiste sur la question évitée par Google tout au long du manifeste : que va faire Google avec toutes les données collectées sur des milliards d’utilisateurs ? Cela permettra-t-il un meilleur contrôle des populations débilitées sous prétexte d’assurer leur sécurité ?
Julien Assange s’insurge contre la vision biaisée de Google
Celui-ci
soutient que ce que les leaders reprochent aux « autocraties
autoritaires », la mort de la vie privée et la manipulation des
citoyens, est en réalité exactement le même dispositif (marketé
différemment) dans les nations dites démocratiques. Celles-ci présentent
internet et le traitement des données comme un « cadeau », qui
permettrait de « mieux répondre aux soucis des citoyens et des
consommateurs ». En effet, pour les auteurs : « Ce que Lockheed Martin
(ndlr : première entreprise mondiale américaine de défense) était au
XXe siècle » (…) « les entreprises de technologie et de cybersécurité le
seront au XXIe siècle ».
Quant au pouvoir de révolte
d’internet et l’exemple rabâché du printemps arabe, de nombreux contre
arguments (même parfois assumés à demi-mot par les auteurs) viennent
contrecarrer la prise de position du livre. Si Internet est entre les
mains des citoyens à l’esprit critique, il est également un furieux
outil de manipulation entre les griffes des leaders Etatiques.
Les auteurs reconnaissent eux-mêmes que si Internet peut soulever des mouvements éphémères, sa structure ancrée dans la fugacité l’empêche de fédérer des tendances révolutionnaires de long terme et de voir émerger des leaders charismatiques. Pour Henri Kissinger, interviewé dans l’ouvrage : « Un leadership d'exception est chose humaine, et cela ne sera pas produit par une communauté sociale massive. Il est difficile d'imaginer que des de Gaulle et des Churchill aient du succès dans l’univers de Facebook ».
Les auteurs reconnaissent eux-mêmes que si Internet peut soulever des mouvements éphémères, sa structure ancrée dans la fugacité l’empêche de fédérer des tendances révolutionnaires de long terme et de voir émerger des leaders charismatiques. Pour Henri Kissinger, interviewé dans l’ouvrage : « Un leadership d'exception est chose humaine, et cela ne sera pas produit par une communauté sociale massive. Il est difficile d'imaginer que des de Gaulle et des Churchill aient du succès dans l’univers de Facebook ».
La conclusion de Julien
Assange est violente, empreinte de la fureur d’un militant qui n’hésite
pas à grossir le trait pour se faire entendre : « Sans même comprendre
comment, ils ont mis à jour et mis sans accroc en application la
prophétie de George Orwell. Si vous voulez une vision de l’avenir,
imaginez des Google Glasses gérées par Washington attachées à des
visages humains vides – pour toujours. »
Il semble difficile d’assimiler la manipulation médiatique de régimes totalitaires tels que la Corée du Nord ou l’Iran et le soft power américain. Mais cependant tout n’est pas à jeter dans ces tirades à la prose assassine.
Il semble difficile d’assimiler la manipulation médiatique de régimes totalitaires tels que la Corée du Nord ou l’Iran et le soft power américain. Mais cependant tout n’est pas à jeter dans ces tirades à la prose assassine.
Nous
pouvons conserver la dynamique qui tente d’éveiller la conscience des
citoyens occidentaux, les incitant à continuer à se battre pour les
libertés d’internet, que ce soit à travers la remise en cause de la
législation ou par le biais d’initiatives parallèles engagées telles que
Wikileaks.
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