Avis d'expert - Il y a 2 ans, dans un rapport intitulé '2010 mobile trends', j’indiquais que vous ne deviez pas compter sur moi pour titrer « 2010, l’année du mobile » pour la bonne et simple raison que les changements induits par la révolution mobile sont trop importants pour qu’on ne leur consacre qu’une seule année. Après tout, qui se souvient de l’année de la TV ou de celle d’Internet ?
Avec un doublement du nombre d’activations journalières de terminaux Android – passant de 350 000 à 700 000 entre avril et décembre derniers, il serait tentant de dire 2011 l’année d’Android. Ou peut-être était-ce l’année de la guerre des systèmes d’exploitation mobile, avec le virage stratégique de Nokia vers l’OS Windows de Microsoft.
Cependant la bataille n’est pas pour autant terminée et de nombreuses autres tendances sont en train de façonner le marché, dont notamment la croissance des tablettes. Je continue de penser que parler de l’année de « … » n’a pas de sens car les nouvelles technologies mobiles ouvrent une période de transition qui va modifier significativement la façon dont les marques et les consommateurs interagissent.
La plupart des tendances identifiées en 2011 restent d’actualité mais sont en train d’évoluer et de s’accélérer. Forrester a donc classé les nouvelles tendances 2012 en 4 catégories : business, ecosystème, attentes des consommateurs et technologies.
Le mobile est un vecteur clé de la stratégie d’entreprise
Les marques qui souhaitent accélérer le déploiement de leur stratégie mobile doivent :
• Industrialiser le déploiement de services mobiles. L’ère du « test and learn » est terminée. Il faut maintenant anticiper les impacts du mobile sur l’organisation de l’entreprise , assurer l’intégration aux systèmes d’information et de CRM, déployer des plans de formation dans le cadre des projets digitaux et de la gestion du changement, et définir un mode de gouvernance pour le mobile. Il sera notamment de plus en plus important de définir de véritables indicateurs de performances pour mesurer la réussite des initiatives mobiles.
• Elaborer une stratégie mobile au-delà des smartphones. L’émergence des tablettes en particulier - qui devraient atteindre un taux de pénétration de 12% parmi la population Européenne d’ici fin 2012 - exige une approche différente de celle des smartphones. Leur contexte d’utilisation diffère et ces nouveaux outils connectés ne sont réellement mobiles que pour une proportion décroissante des utilisateurs. Les tablettes vont cannibaliser le temps passé à domicile sur les smarpthones.
• Différencier l’expérience utilisateur. L’avantage du premier entrant se réduit maintenant que la plupart des marques ont une présence minimum sur le mobile. La différentiation viendra davantage de la capacité à créer des expériences plus simples et encore plus intuitives qui utiliseront au mieux les caractéristiques uniques du mobile (intimité, immédiateté, contexte). L’importance accordée au design et à l’expérience client fera la différence.
L’écosystème mobile va accueillir de nouveaux entrants
En l’espace de 5 ans, Apple et Google ont révolutionné la chaîne de valeur traditionnelle des télécoms dominés par les marques de terminaux historiques et par les opérateurs qui contrôlaient la distribution des services mobiles. De nouveaux acteurs – venus d’horizons différents – devraient jouer un rôle nouveau. Les principales tendances attendues par Forrester sont les suivantes:
• L’émergence des portefeuilles mobiles digitaux et leur capacité à aller au-delà du paiement. Les téléphones mobiles seront progressivement convertis en portefeuilles digitaux qui combinent non seulement le paiement, mais également, reçus, coupons et cartes de fidélité. Les consommateurs vont bénéficier de la facilité d’utilisation du téléphone pour régler leurs achats, en bénéficiant d’avantages avant et après la transaction (bons de réduction, information produits personnalisée sur le point de vente, points de fidélité, etc…). C’est tout le sens de l’approche d’un eBay/PayPal avec l’acquisition de sociétés come RedLaser, Milo, Where ou encore Hunch.
• La guerre des OS n’est pas terminée. Si vous avez vraiment besoin d’une application native, iOS et Android sont devenus incontournables. Il va y avoir de nouveaux morts et les blessés actuels vont avoir du mal à se redresser. Il y a terme de l’espace pour une 3ème plateforme OS. Windows est un bon candidat, mais même en exécutant leur stratégie parfaitement avec une nouvelle gamme de terminaux et un nouvel univers de marque, Nokia et Microsoft vont avoir du mal à s’imposer dès 2012.
• Amazon et Facebook vont jouer un nouveau rôle dans la distribution de services mobiles. Amazon ne réussira pas à répliquer l’approche du Kindle sur le marché très encombré des smartphones pas plus que Facebook n’investissera avec succès dans un téléphone. Bien que leurs rôles respectifs dans l’univers mobile soient encore flous, Amazon et Facebook ont tous les atouts pour devenir des plateformes de distribution de contenus et services mobiles. L’utilisation de leur savoir-faire dans la gestion de communautés de développeurs ou dans leur capacité à faciliter la découverte de services mobiles par des outils de personnalisation et de recommandation en fera probablement des alternatives à l’Android Market ou à l’Apple Store.
Les attentes des consommateurs sont à la fois élevées et contradictoires
Les professionnels qui développent des services mobiles vont devoir prendre en compte les éléments suivants :
• Les consommateurs attendent plus d’expérience contextuelles… Le téléphone mobile a la capacité de collecter un nombre impressionnant d’informations sur son utilisateur et d’offrir de nouveaux services uniques au mobile et différents du PC. Les téléphones mobiles vont devenir les hubs de l’interaction consommateur, non seulement avec d’autres personnes, mais également avec d’autres services et machines, comme la TV, les voitures et même des appareils médicaux. Les produits physiques (des chaussures aux téléviseurs) vont de plus en plus avoir leurs compagnons digitaux et mobiles.
• …Mais ils se préoccuperont plus de la confidentialité et de la sécurité. Lorsque les media ont réalisé que plusieurs acteurs du marché étaient en train de traquer où se trouvait l’utilisateur pour améliorer leurs services, ils ont provoque un tollé. La localisation géographique n’est d’ailleurs pas forcément l’élément central. Le téléphone mobile connait tout de son consommateur. Les préoccupations du consommateur portent 1/ sur l’utilisation commerciale de ses informations, et 2/ sur la sécurité, étant donné l’utilisation croissante du mobile banking et des transactions mobiles.
Les technologies émergentes ont besoin de standards et de taille critique pour réussir
Certaines technologies comme HTML5, le NFC ou encore le peronsal cloud computing vont susciter beaucoup d’enthousiasme. Et pourtant, il faut garder à l’esprit que:
• Si HTML5 a fait d’énormes progrès, mais ce n’est encore pas la panacée. L’abandon de Flash par Adobe en fin d’année dernière et le support de HTML5 par des poids lourds de l’industrie comme Apple, Google, Amazon, et Microsoft ont multiplié son potentiel en tant que solution pour atteindre une cible plus large à moindre coût. Mais deux choses importantes constituent encore un frein : 1/ les différences d’expérience et de performance entre les applications natives et web sont notables et 2/ tirer parti de tous les avantages de HTML5 exige aussi une optimisation au niveau du terminal et de l’OS. Encore une fois, il ne s’agit pas d’un choix exclusif (cf ma précédente tribune)
• Malgré l’émergence du NFC, les usages resteront niches. Des douzaines de millions de terminaux NFC en provenance de nombreux constructeurs, dont enfin Apple, seront vendus en 2012. Les JO de Londres seront utilisés comme catalyseurs marketing pour aider à présenter les nombreux usages potentiels de la technologie (cf ma tribune précédente). Mais au final, le faible parc installé, une expérience utilisateur limitée, un manque d’éducation consommateur et surtout un manque d’infrastructure vont limiter l’usage.
• La notion de personal cloud va s’étendre mais... L’informatique dans les nuages est un concept très présent dans les directions informatiques. Pourtant de nombreux services comme Dropbox, Spotify ou encore iCloud d’Apple sont déjà une réalité pour les consommateurs. Le personal cloud computing va prendre de l’importance et permettre d’offrir une palette de services accessibles à travers différents terminaux connectés mais sera limité par la capacité du réseau et son engorgement.
Thomas Husson est analyste au sein du cabinet d'études et de conseil Forrester Research, il contribue au blog Consumer Product Strategy Professionals. Ce billet a été reproduit avec l'autorisation de Forrester Research.
http://www.businessmobile.fr/actualites/la-tribune-de-thomas-husson-forrester-les-tendances-2012-du-mobile-39768407.htm#EREC-103
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire