A lire sur: http://www.usine-digitale.fr/article/les-services-de-partage-bouleversent-l-economie-mondiale.N205404#xtor=EPR-4
Par Nora Poggi - Publié le
Les services dits "de partage", ou collaboratifs, deviennent de plus en
plus populaires au travers d'entreprises comme Airbnb, Uber, Lyft,
Chauffeur Privé ou Blablacar en France. Ces compagnies se heurtent
toutefois à des obstacles juridiques sans fin. Pourquoi
bouleversent-elles tant l'économie mondiale?
Une nouvelle industrie a vu le jour avec
la multiplication des services collaboratifs, qui permettent aux
utilisateurs de partager l'usage d'un bien. Voiture, appartement... Les
entreprises comme Airbnb, Uber, Lyft, Taskrabbit ou Blablacar en France
sont les représentantes les plus connues cette nouvelle économie dite
"du partage". Elles se rémunèrent grâce à une commission prélevée sur
les transactions effectuées entre particuliers, et favorisent les
échanges.
Longtemps ignorés par les industries traditionnelles, ces services sont maintenant obligés de se battre en justice pour établir leur légitimité. Révolution en marche ou industrie hors-la-loi ?
Elles changent la donne
Ces entreprises ont permis de monétiser de nouveaux biens, et ont créé de nouveaux marchés, comme celui de la location de logement entre particuliers que Rachel Botsman, experte du sujet, estime à 26 milliards de dollars. L'auteur de "What's Mine Is Yours: The Rise of Collaborative Consumption" estime également à plus de 100 milliards de dollars le poids de l'économie du partage, mais admet qu'il est encore trop tôt pour se prononcer sur des chiffres précis. Ces services de partage ont surtout permis une redistribution du pouvoir économique. En mars dernier à SXSW, la conférence technologique d'Austin au Texas, un panel composé d'Airbnb, Etsy (le site de vente en ligne de créations maison), Relay Rides, expliquait que la notion clé de cette économie est "l'empowerment". Traduction : en ces temps de crise, il s'agit de redonner le pouvoir aux individus, qui utilisent leurs propres biens pour créer des formes alternatives de revenus. Selon Nathan Blecharczyk, co-fondateur d'Airbnb, c'est également pour les utilisateurs "une façon de contribuer", et de reprendre part à une économie qui les a mis sur la touche.
Elles dérangent
Ces entreprises se sont rapidement heurtées aux industries traditionnelles et aux régulateurs qui les assignent en justice pour concurrence déloyale. En France, les taxis ont remporté la bataille pour l'instant face aux Véhicules de Tourisme avec Chauffeur. Aux Etats-Unis, Airbnb est en difficulté face aux lobbys hôteliers, et à New-York son utilisation est plus ou moins devenue illégale. Uber vient de perdre une énième bataille aux Etats-Unis, dans la ville de Dallas. De nombreux commentateurs y ont vu un favoritisme des politiques envers les taxis traditionnels. Toutefois en Californie, berceau de nombre de ces start-up, la Commission des Services Publics a enfin autorisé les services comme Uber et Lyft - sous certaines conditions bien précises - en établissant une toute nouvelle catégorie de service, la "Transportation Network Company". Signe que les temps changent ?
Elles sont solidaires
Pour lutter contre les régulateurs et les sceptiques - comme pour eBay et Amazon, les comportements ne changent pas du jour au lendemain - l'industrie s'est associée à un nouveau groupe de défense : Peers. Cette association, qui se défend d'agir comme un lobby auprès des politiciens, a toutefois pour but de "répandre, protéger et stimuler" l'économie du partage. Elle se présente comme un mouvement citoyen, mais en choisissant de défendre à la fois les intérêts des entreprises et des consommateurs, elle participe au flou qui règne autour de l'économie du partage.
Elles entretiennent le flou
Finalement, ni les politiques, ni les industries traditionnelles, ni même les entreprises de l'économie du partage, ne savent exactement où sont les limites entre innovation et illégalité. Le nom lui-même, "sharing economy" a été dénoncé comme une forme d'imposture par nombre de commentateurs, dont l'ancien journaliste du magazine américain Wired, Ryan Singel, qui en a exprimé toute l'ambiguïté dans un tweet.
En se présentant comme un mouvement qui fait bloc, ces entreprises rendent plus difficile l'analyse de leur impact individuel. Une clarification est cependant nécessaire. En effet, elles veulent que les utilisateurs se battent pour elles, mais ce flou les protège aussi, puisqu'elles ne considèrent pas les fournisseurs de services tels les conducteurs comme des employés. Une façon d'avoir le beurre et l'argent du beurre ?
Malgré tout, ces entreprises se lancent dans la bataille pour leur légitimité avec aplomb, et comme nombre d'innovateurs, se retrouvent en première ligne pour combattre le statu quo. Une révolution a bel et bien commencé.
Nora Poggi
Longtemps ignorés par les industries traditionnelles, ces services sont maintenant obligés de se battre en justice pour établir leur légitimité. Révolution en marche ou industrie hors-la-loi ?
Elles changent la donne
Les entreprises phares de l’économie du partage
- Airbnb, le service américain de location de logements entre particuliers fondé en 2008, comptait 4,5 millions d'utilisateurs en 2013 selon Fast Company. Le site permet de sous-louer son appartement ou de loger "chez l'habitant", pour moins cher qu'à l'hôtel est estimée à 2,5 milliards de dollars.
- Taskrabbit, site sur lequel on peut louer les services d'un particulier, du ménage au design de site internet, avait levé près de 38 millions de dollars, mais vient de licencier 20% de ses effectifs.
- Uber offre un service de commande de chauffeur privé via une application smartphone. Arrivée en France il y a près de deux ans, cette compagnie californienne est maintenant présente dans 35 pays. Une réplique française, Chauffeur-privé, grandit en popularité.
- Sur Lyft,une autre application smartphone, les particuliers deviennent chauffeurs en utilisant leur propre voiture et les courses sont commandées en un clic.
- BlaBlaCar, site français de covoiturage créé en 2004, compte 3 millions de membres. Son patron affirme que la compagnie transporte 600 000 passagers par mois.
- Airbnb, le service américain de location de logements entre particuliers fondé en 2008, comptait 4,5 millions d'utilisateurs en 2013 selon Fast Company. Le site permet de sous-louer son appartement ou de loger "chez l'habitant", pour moins cher qu'à l'hôtel est estimée à 2,5 milliards de dollars.
- Taskrabbit, site sur lequel on peut louer les services d'un particulier, du ménage au design de site internet, avait levé près de 38 millions de dollars, mais vient de licencier 20% de ses effectifs.
- Uber offre un service de commande de chauffeur privé via une application smartphone. Arrivée en France il y a près de deux ans, cette compagnie californienne est maintenant présente dans 35 pays. Une réplique française, Chauffeur-privé, grandit en popularité.
- Sur Lyft,une autre application smartphone, les particuliers deviennent chauffeurs en utilisant leur propre voiture et les courses sont commandées en un clic.
- BlaBlaCar, site français de covoiturage créé en 2004, compte 3 millions de membres. Son patron affirme que la compagnie transporte 600 000 passagers par mois.
Ces entreprises ont permis de monétiser de nouveaux biens, et ont créé de nouveaux marchés, comme celui de la location de logement entre particuliers que Rachel Botsman, experte du sujet, estime à 26 milliards de dollars. L'auteur de "What's Mine Is Yours: The Rise of Collaborative Consumption" estime également à plus de 100 milliards de dollars le poids de l'économie du partage, mais admet qu'il est encore trop tôt pour se prononcer sur des chiffres précis. Ces services de partage ont surtout permis une redistribution du pouvoir économique. En mars dernier à SXSW, la conférence technologique d'Austin au Texas, un panel composé d'Airbnb, Etsy (le site de vente en ligne de créations maison), Relay Rides, expliquait que la notion clé de cette économie est "l'empowerment". Traduction : en ces temps de crise, il s'agit de redonner le pouvoir aux individus, qui utilisent leurs propres biens pour créer des formes alternatives de revenus. Selon Nathan Blecharczyk, co-fondateur d'Airbnb, c'est également pour les utilisateurs "une façon de contribuer", et de reprendre part à une économie qui les a mis sur la touche.
Elles dérangent
Ces entreprises se sont rapidement heurtées aux industries traditionnelles et aux régulateurs qui les assignent en justice pour concurrence déloyale. En France, les taxis ont remporté la bataille pour l'instant face aux Véhicules de Tourisme avec Chauffeur. Aux Etats-Unis, Airbnb est en difficulté face aux lobbys hôteliers, et à New-York son utilisation est plus ou moins devenue illégale. Uber vient de perdre une énième bataille aux Etats-Unis, dans la ville de Dallas. De nombreux commentateurs y ont vu un favoritisme des politiques envers les taxis traditionnels. Toutefois en Californie, berceau de nombre de ces start-up, la Commission des Services Publics a enfin autorisé les services comme Uber et Lyft - sous certaines conditions bien précises - en établissant une toute nouvelle catégorie de service, la "Transportation Network Company". Signe que les temps changent ?
Elles sont solidaires
Pour lutter contre les régulateurs et les sceptiques - comme pour eBay et Amazon, les comportements ne changent pas du jour au lendemain - l'industrie s'est associée à un nouveau groupe de défense : Peers. Cette association, qui se défend d'agir comme un lobby auprès des politiciens, a toutefois pour but de "répandre, protéger et stimuler" l'économie du partage. Elle se présente comme un mouvement citoyen, mais en choisissant de défendre à la fois les intérêts des entreprises et des consommateurs, elle participe au flou qui règne autour de l'économie du partage.
Elles entretiennent le flou
Finalement, ni les politiques, ni les industries traditionnelles, ni même les entreprises de l'économie du partage, ne savent exactement où sont les limites entre innovation et illégalité. Le nom lui-même, "sharing economy" a été dénoncé comme une forme d'imposture par nombre de commentateurs, dont l'ancien journaliste du magazine américain Wired, Ryan Singel, qui en a exprimé toute l'ambiguïté dans un tweet.
En se présentant comme un mouvement qui fait bloc, ces entreprises rendent plus difficile l'analyse de leur impact individuel. Une clarification est cependant nécessaire. En effet, elles veulent que les utilisateurs se battent pour elles, mais ce flou les protège aussi, puisqu'elles ne considèrent pas les fournisseurs de services tels les conducteurs comme des employés. Une façon d'avoir le beurre et l'argent du beurre ?
Malgré tout, ces entreprises se lancent dans la bataille pour leur légitimité avec aplomb, et comme nombre d'innovateurs, se retrouvent en première ligne pour combattre le statu quo. Une révolution a bel et bien commencé.
Nora Poggi
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