dimanche 27 octobre 2013

Le transfert de la réponse graduée au CSA sera voté avant les municipales Voeux 2014 d'Aurélie Filippetti

A lire sur:  http://www.pcinpact.com/news/84000-le-transfert-reponse-graduee-au-csa-sera-vote-avant-municipales.htm

Aurélie Filippetti va présenter son projet de loi sur la Création au début 2014, avant les élections municipales. C’est ce qu’elle a affirmé hier lors d’un déjeuner avec l’Association des journalistes médias, rapporte la lettre spécialisée Satellifax.
filippetti

Ce grand texte est censé mettre en œuvre les préconisations du rapport Lescure avec en tête, le transfert au CSA de la réponse graduée. La Hadopi s'effacera ainsi des écrans, dépossédée de son cœur de métier. Présenté en conseil des ministres avant Noel et voté avant les élections municipales de mars 2014, ce projet de loi n'évitera pas au PS d'avoir à expliquer aux futurs électeurs rencontrés sur les marchés pourquoi il aura finalement renié ses engagements politiques (sur la longue dégénérescence d'Aurélie Filippetti, voir notre panorama).

Ce transfert ne devrait en outre pas être d’une simplicité biblique. Le projet d’amendement Assouline qui circulait dans les couloirs du ministère de la Culture programmait une simple greffe de compétence de la Hadopi vers le CSA. Un décret transversal était attendu pour mettre à jour le train des 13 textes mettant en œuvre les lois Hadopi 1 et 2, où l’expression « CSA » aurait remplacé celle de « Hadopi ». Un simple changement de moquette, de logo et de peinture sur les murs.

Aiguiser la riposte graduée ou opérer un simple transfert ?

Or, cette grande loi sur la création sera surtout l’occasion d’aiguiser davantage encore la riposte graduée. L'occasion sera trop belle, alors que sur ce terrain, les voeux sont nombreux. La Hadopi a par exemple exprimé dans son rapport le souhait de voir naître des prérogatives nouvelles « car on ne voit pas pourquoi le CSA, s’il récupère la Hadopi uniquement avec les moyens de la Hadopi, ferait mieux que la Hadopi » nous a expliqué Mireille Imbert Quaretta, présidente de la commission de protection des droits, tourelle pénale de la Hadopi.

Parmi ces nouvelles mesures, la Hadopi voudrait que lui soit confiée la charge d’acheminer directement les emails d'avertissement, histoire de gagner en rapidité et en coût (ces acheminements font partie des frais facturés par les FAI). Elle souhaiterait aussi porter de six mois à un an le délai pendant lequel les procureurs de la République peuvent la saisir.

Ce n’est pas tout. La Hadopi estime utile que les auteurs puissent la saisir directement après un simple constat d’huissier. Dans le flux des données qu’elle manipule, la Rue de Texel juge nécessaire que le port source de la connexion flashé sur les réseaux P2P soit communiqué au FAI. Cette modification « permettrait par ailleurs aux professionnels qui mettent des accès Internet à disposition de tiers d’identifier l’utilisateur final à l’origine des faits de mise à disposition pour le sensibiliser tout particulièrement sur l’enjeu et les impacts des faits de contrefaçon qu’il a commis ». Enfin, il s’agirait de mentionner dans les avertissements le nom des oeuvres téléchargées illégalement.

De nouvelles compétences ?

Au-delà de la riposte graduée, la Hadopi aimerait aussi étendre à trois ans la durée d’attribution du label PUR, aujourd’hui délivré pour un an. Cette labellisation est regardée de près par le rapport Lescure qui pousse le rêve jusqu’à imaginer des petites pastilles dans les résultats des moteurs pour mieux identifier ces bons éléments bien légaux… La Hadopi demande d’ailleurs à ce que le renouvellement des labels soit grandement facilité. Elle voudrait au surplus que ces labels soient attribuables aux services en ligne (plateforme UGC ou User Generated Content, comme Youtube ou Dailymotion), non plus seulement aux prestataires d’offres (sites d’Universal, etc.).

L’imagination fertile de la Hadopi va jusqu’à réclamer l’accès à des données essentielles détenues par les FAI : par exemple des données quantitatives et anonymisées permettant de comparer les pratiques de streaming à d’autres usages. Cette même institution voudrait aussi réguler les mesures techniques de protection sur les logiciels et les jeux vidéo, mais encore les mesures techniques d’information comme le dispositif ContentID de YouTube afin d’en déterminer l’efficacité.

Un rapport Lescure qui a du plomb dans l'aile, notamment à l'Arcep

Pour sa part, le rapport Lescure a pour l’heure un peu de plomb dans l’aile. La possibilité pour le CSA d’infliger des amendes administratives au lieu et place du système contraventionnel décidé par le juge a été abandonnée. Idem la taxe sur les appareils connectés, reportée à une date ultérieure, même si Lescure y croit encore.

Autre mesure déjà dénoncée, la possibilité de prioriser l’accès aux plateformes les plus généreuses avec l’exception culturelle : « une priorité dans la gestion des débits pourrait même être envisagée, sous le contrôle de l’ARCEP et dans le respect des règles qui seront adoptées concernant la neutralité du net » peut-on lire p.161 du rapport Lescure (voir notre actualité). Mais l’ARCEP n’a pas bien accueilli cette idée comme le rapporte notre confrère Samuel Le Goff sur Contexte : « L’ARCEP ne laissera pas faire ce hold-up de la priorisation de trafic sur internet » a tambouriné  Jean-Ludovic Silicani, hier lors du colloque annuel de l’Autorité.

Les tentacules du CSA sur les services de média à la demande

Seules mesures aujourd’hui en passe d’être validées, la capacité pour le CSA de déployer davantage encore ses tentacules sur les Services de Médias Audiovisuels à la Demande (VOD, service en ligne de télévision de rattrapage, etc.). La mesure est inscrite dans l’actuel projet de loi sur l’audiovisuel, désormais en bout de course parlementaire, après passage en commission mixte paritaire. Au grand dam de l’Association des acteurs du web 2.0 , les SMAD seront ainsi soumis à une obligation de déclaration d’existence, genou à terre au perron du CSA, lequel deviendra en outre arbitre – et donc régulateur - pour le règlement des différends.
Marc Rees

Journaliste, rédacteur en chef

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