A lire sur: http://www.usinenouvelle.com/article/le-numerique-nous-renvoie-t-il-aux-temps-modernes-de-chaplin.N186809
Par Emmanuelle Delsol - Publié le
Cette conversation entre Christian Mathorel et Guy Mamou-Mani a eu lieu à l'occasion d'une table ronde du forum Big Tent Paris, organisé par Google ce lundi 26 novembre. Le sujet : "l'industrie européenne sera-t-elle sauvée par le numérique ?" Et forcément, la discussion était plutôt partie sur le ton du "numérique, c'est fantastique." Et effectivement, comme le sujet est loin d'être au premier plan en France, tous les arguments qui risquent de freiner son développement sont contrariants... « Plutôt que de renationaliser les hauts-fourneaux, investissons dans le numérique, » a même lancé plein d'enthousiasme Guy Mamou-Mani. Et de plus en plus d'études prouvent que le numérique (qu'il s'agisse du secteur ou du moyen) est source de croissance pour les états, source de performance des entreprises, y compris industrielles (www.usinenouvelle.com/article/le-numerique-atout-de-performance-pour-les-industriels-aussi.N186722), et donc sources d'emplois.
Pour autant, faut-il se voiler la face ? Faut-il en particulier nier la dégradation des conditions de travail et la destruction d'emploi liées au numérique ? C'est bel et bien lui qui permet, dans les call centers, une automatisation des tâches peu humaines. Que dire de la disponibilité permanente des cadres, en particulier, depuis l'arrivée des smartphones, sujet de stress? Stress lié aussi à l'efficacité en temps réel exigée par les entreprises en contact permanent avec leurs employés.
On pourrait même évoquer les conditions de travail dans le monde du numérique, même si la situation est un peu plus complexe : dans le monde merveilleux d'Internet, les salles de gym, la nourriture et les boissons gratuites à volonté, les espaces de jeux sont aussi des moyens de garder les employés le plus longtemps possible sur leur lieu de travail. L'an dernier, des employés d'Amazon se sont plaints des cadences mais aussi d'une chaleur de l'ordre de 38°C dans certains entrepôts... et cela se passait aux USA...
Inutile d'aller plus loin en rappelant le plan de suppressions de postes chez Alcatel-Lucent, ceux de SFR et Bouygues Telecoms, les fermetures de boutiques chez The Phone House, ou l'impossible transfert de compétences entre les secteurs industriels historiques qui dégraissent et le numérique qui recrute... c'est encore un autre sujet.
Alors certes, Christian Mathorel use d'une rhétorique attendue de la part de la CGT : "toute révolution doit conduire au progrès social,» qui peut perturber les adeptes du numérique habitués à parler croissance et accélération. Pour autant, et sans remettre en cause l'importance d'aller de l'avant, faut-il éluder sa question : « quelle est aujourd'hui la véritable finalité du numérique?" Cette troisième révolution industrielle est inévitable et attendue. Et elle n'a aucun intérêt à rejouer les Temps Modernes.
Emmanuelle Delsol
Par Emmanuelle Delsol - Publié le
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"Avec les outils du numérique, dans les centres d'appel, les agents
lisent sur un écran des dialogues pré-écrits pour eux, leurs pauses pipi
sont minutées, ... Ce sont les nouveaux Temps Modernes !" A la
provocante évocation par Christian Mathorel, secrétaire général CGT
telecoms, au film de Charlie Chaplin sorti en 1936, Guy Mamou-Mani,
président du Syntec numérique n'a pu réprimé un soupir... "La discussion
était pourtant bien partie, sur la vision du numérique, et vous nous
faites revenir dans la réalité!" a-t-il regretté.
Cette conversation entre Christian Mathorel et Guy Mamou-Mani a eu lieu à l'occasion d'une table ronde du forum Big Tent Paris, organisé par Google ce lundi 26 novembre. Le sujet : "l'industrie européenne sera-t-elle sauvée par le numérique ?" Et forcément, la discussion était plutôt partie sur le ton du "numérique, c'est fantastique." Et effectivement, comme le sujet est loin d'être au premier plan en France, tous les arguments qui risquent de freiner son développement sont contrariants... « Plutôt que de renationaliser les hauts-fourneaux, investissons dans le numérique, » a même lancé plein d'enthousiasme Guy Mamou-Mani. Et de plus en plus d'études prouvent que le numérique (qu'il s'agisse du secteur ou du moyen) est source de croissance pour les états, source de performance des entreprises, y compris industrielles (www.usinenouvelle.com/article/le-numerique-atout-de-performance-pour-les-industriels-aussi.N186722), et donc sources d'emplois.
Pour autant, faut-il se voiler la face ? Faut-il en particulier nier la dégradation des conditions de travail et la destruction d'emploi liées au numérique ? C'est bel et bien lui qui permet, dans les call centers, une automatisation des tâches peu humaines. Que dire de la disponibilité permanente des cadres, en particulier, depuis l'arrivée des smartphones, sujet de stress? Stress lié aussi à l'efficacité en temps réel exigée par les entreprises en contact permanent avec leurs employés.
On pourrait même évoquer les conditions de travail dans le monde du numérique, même si la situation est un peu plus complexe : dans le monde merveilleux d'Internet, les salles de gym, la nourriture et les boissons gratuites à volonté, les espaces de jeux sont aussi des moyens de garder les employés le plus longtemps possible sur leur lieu de travail. L'an dernier, des employés d'Amazon se sont plaints des cadences mais aussi d'une chaleur de l'ordre de 38°C dans certains entrepôts... et cela se passait aux USA...
Inutile d'aller plus loin en rappelant le plan de suppressions de postes chez Alcatel-Lucent, ceux de SFR et Bouygues Telecoms, les fermetures de boutiques chez The Phone House, ou l'impossible transfert de compétences entre les secteurs industriels historiques qui dégraissent et le numérique qui recrute... c'est encore un autre sujet.
Alors certes, Christian Mathorel use d'une rhétorique attendue de la part de la CGT : "toute révolution doit conduire au progrès social,» qui peut perturber les adeptes du numérique habitués à parler croissance et accélération. Pour autant, et sans remettre en cause l'importance d'aller de l'avant, faut-il éluder sa question : « quelle est aujourd'hui la véritable finalité du numérique?" Cette troisième révolution industrielle est inévitable et attendue. Et elle n'a aucun intérêt à rejouer les Temps Modernes.
Emmanuelle Delsol
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