Par Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences
Les batteries lithium-ion
pourraient voir leur autonomie décuplée et le temps de recharge se
réduire à un quart d’heure : c’est ce que démontre une équipe de
physiciens. L’astuce : modifier la structure des électrodes pour les
rendre plus efficaces, avec du graphène, du silicium et des trous.
Aujourd’hui dominantes dans les appareils mobiles, les batteries dites lithium-ion
voient leurs performances stagner depuis quelques années. Or elles ne
suffisent pas ! Elles sont trop grosses pour les mobiles, par exemple,
et certains cherchent à en réduire l'épaisseur, jusqu'à les rendre imprimables voire incluses dans un vêtement. Au fil des ans, la baisse de consommation des circuits électroniques ne compense que peu ou pas du tout l’augmentation de puissance des smartphones, avec leurs écrans grandissants et leurs appareils photo sophistiqués.
Une équipe de l’école McCormick (Northwestern University,
Chicago, États-Unis) vient de montrer une voie pour améliorer
drastiquement ces batteries au prix d’une modification somme toute
mineure de l’anode. Leur trouvaille, publiée dans la revue Advanced Energy Materials, multiplierait par dix la capacité. « Même
après 150 recharges – ce qui correspond à une année d’utilisation –,
notre batterie est encore cinq fois plus efficace que les modèles neufs
du commerce » explique dans le communiqué Harold H. Kung, auteur
principal de la publication. De plus, le temps de recharge, affirme
l’équipe, descend à 15 minutes.
C’est dans l’intimité du fonctionnement de la
batterie que réside l’innovation. Dans un modèle classique, l’anode
(l’électrode négative, donc le « - » de la batterie) est constitué de graphite, du carbone pur (la mine de nos crayons) où les atomes sont organisés en plans – le graphène – empilés les uns sur les autres. Quand la batterie débite du courant, les ions lithium, via l’électrolyte, se déplacent de la cathode
(qui contient des oxydes de lithium) vers l’anode et s’y accrochent.
L’un des facteurs qui déterminent la capacité d’une batterie à maintenir
sa charge est la quantité d’ions lithium qui peuvent s’accumuler sur
l’anode (et sur la cathode pendant la recharge).
Entre
les feuilles de graphène (en rouge) sont glissés des amas d'atomes de
silicium (en vert). Des trous ouvrent le passage aux ions lithium (en
bleu) dans l'épaisseur des couches. © McCormick School
Un peu de silicium dans l'anode
Les chimistes de McCormick ont conservé l’idée du graphite mais ont glissé entre les feuilles de graphène
des amas de silicium. Sur un plan de graphène, en effet, un atome de
lithium se fixe sur un ensemble (hexagonal) de six atomes de carbone, et
pas davantage. Or un seul atome de silicium peut retenir quatre atomes
de lithium. L’équipe explique avoir essayé de remplacer le graphite par
du silicium mais cela ne donne pas de bons résultats : l’anode se
fragmente et se détériore rapidement. D’où l‘idée des amas de silicium
inclus entre les feuilles de graphène. Voilà donc la capacité augmentée.
Pour accélérer la recharge, les scientifiques ont perforé le graphène, par oxydation, pour percer les feuilles de trous de 10 à 20 nanomètres
de diamètre. En effet, lors de la charge, les ions lithium viennent se
coller sur la surface de carbone, s’y fixent tout de suite, ou, quand
toutes les places sont occupées, continuent leur chemin jusqu’au bord de
la feuille et passent sur l’autre face pour tenter leur chance à
l’étage inférieur, comme une voiture dans un parking souterrain. En leur
proposant des trouées, on accélère la vitesse de leur pénétration dans
l’épaisseur et donc la rapidité de la charge.
Si l’explication de la prouesse est relativement
simple, les résultats quantitatifs sont étonnants. Multiplier par dix la
capacité d’une batterie sans toucher au principe de son fonctionnement,
ce n’est pas rien… Les difficultés d’industrialisation du procédé ne
sont pas précisées : on est encore au laboratoire. D’ailleurs, ces
chimistes affirment qu’ils n’ont pas dit leur dernier mot car ils
veulent maintenant s’attaquer à la cathode, celle qui contient le
lithium, et qui pourrait peut-être en stocker davantage, ou le lâcher
plus facilement, ce qui augmenterait la capacité ou le débit. L'angoisse de la batterie vidée dans la journée disparaîtra-t-elle ?
http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/informatique/d/des-batteries-dix-fois-meilleures-cest-possible_34759/#xtor=EPR-17-[QUOTIDIENNE]-20111124-[ACTU-des_batteries_dix_fois_meilleures__c_est_possible]
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