mercredi 20 juillet 2011

Rapport COTEC 2011 sur l'état de l'innovation espagnole

http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/67280.htm

De par la richesse des informations qu'ils synthétisent, les rapports annuels de la fondation COTEC sur l'état de l'innovation espagnole font référence. Cette année encore, ce n'est rien moins que le roi d'Espagne et la ministre de science et innovation en personne qui ont assisté en juin dernier à l'assemblée annuelle de la fondation dont le point d'orgue fut la présentation du document en question, "Informe 2011 sobre Tecnologia e Innovación en España" [1]. Ceux qui lisent l'espagnol y trouveront une mine de données et d'analyses sur le système de R&D de notre voisin.

Ce document imposant de près de 350 pages qui s'appuie sur les chiffres 2009, est divisé en deux parties. La seconde, la plus courte, présente sous forme de multiples tableaux, un ensemble de chiffres bruts qui, accompagnés de données supplémentaires, servent à l'analyse conduite dans la première partie.

Comme les années précédentes, celle-ci est divisée en cinq chapitres :

1) Technologie et compétitivité. Ce long chapitre qui constitue pratiquement un tiers du document global, analyse les principaux facteurs mesurant l'innovation technologique (moyens financiers et humains) et ses résultats (brevets, publications, etc.). De nombreuses comparaisons sont faites entre régions d'Espagne et entre l'Espagne et ses partenaires. Signalons au passage un long développement sur le système d'innovation hongrois.

2) Science, technologie et société. Cette année, ce chapitre est consacré à étudier plus spécifiquement l'innovation dans le secteur des services, un secteur qui, s'il génère des parts importantes de PIB, est peu documenté sous l'angle de l'innovation aux dires des rédacteurs.

3) Technologie et entreprise. Cette partie s'intéresse aux caractéristiques saillantes des dépenses en R&D effectuées par les entreprises, en regardant par région et par secteur et en replaçant cela dans le cadre européen mais aussi international.

4) Politique d'exécution et de financement de l'innovation. Ce chapitre analyse les actions en matière de R&D et d'innovation du gouvernement central et de ceux des 17 régions espagnoles, fortement autonomes, mais aussi de ceux des principaux pays de l'UE et de l'OCDE.

5) Indicateurs COTEC. Cette ultime partie présente les résultats d'une enquête effectuée auprès d'un panel d'experts espagnols sur leur perception des problèmes et des tendances du système de R&D de leur pays.

Un sixième et dernier texte intitulé Considérations finales, conclut cette première partie. C'est ce texte dont nous proposons ci-dessous une traduction :

Les dernières données officielles disponibles pour produire ce rapport datent principalement de l'année 2009 (celles en provenance de l'Institut National de Statistique espagnol - INE) et de 2008 (celles des organismes internationaux). Les chiffres contenus dans le rapport ne reflètent donc pas les conséquences de la crise que connaissent les différents pays, encore moins la reprise qui peut se noter dans certains d'entre eux. Par contre, les opinions des experts du panel Cotec sur l'évaluation des problèmes et des tendances de l'innovation espagnole, ont été recueillies fin 2010 et donnent donc une vision très actuelle de la situation.

La crise a eu des conséquences importantes dans la manière d'appréhender l'innovation. Cela s'est traduit au niveau de la sphère publique par un clair intérêt à élaborer des stratégies d'innovation et dans celle privée, par une plus grande conscience des salariés de l'importance d'accroître leur compétitivité. Des efforts ont été faits pour que le rapport reflète cette situation. Par exemple, le chapitre II traite spécifiquement de l'innovation dans les services et fait référence en permanence aux stratégies, aux nouvelles formes de politiques d'innovation comme celles basées sur la demande, ou à la prise en compte de l'éducation comme élément clé de la compétitivité d'un pays. Cette nouvelle vision de l'innovation nécessite un examen approfondi des indicateurs qui la caractérisent : dans les années à venir, nous allons certainement assister à une modification des paramètres couramment utilisés.

Il n'en demeure pas moins que les dépenses de R&D restent un indicateur important de l'attitude innovante d'un pays. Bien que cet indicateur pour l'Espagne ait chuté en 2009 pour la première fois, de pas moins de 6,3%, une analyse plus fine des données montre que la réduction des dépenses a été très sélective et réfléchie. Ainsi, alors que le total des dépenses courantes a même augmenté légèrement, ce sont les dépenses en capital qui ont absorbé la totalité de la réduction en baissant de 36,8%. Par ailleurs, lorsque ces changements sont analysés par taille d'entreprises, celles de plus de 250 employés maintiennent leurs dépenses totales en augmentant de 3,3% les dépenses courantes et en réduisant de 22% les dépenses en capital. Les PME ont réduit leurs dépenses totales de 11,8%, mais leurs dépenses courantes n'ont baissé que de1,7% quand celles en capital ont chuté de 42,8%.

Le nombre d'entreprises exerçant des activités de R&D en Espagne a également subi les effets de la crise puisque ce nombre a baissé de 9,6%, mais là encore, les comportements sont disparates. Les entreprises de plus de 250 employés n'étaient en 2009 qu'environ 1 150, soit 9,11% de moins qu'en 2008, mais le nombre de leurs chercheurs a augmenté de 3,8%, ce qui est cohérent avec l'augmentation déjà mentionnée des dépenses courantes de cette catégorie d'entreprises, même si l'intensité de R&D dans ces entreprises n'est que de 0,8%.

Les entreprises qui font de la R&D et qui emploient entre 50 et 249 personnes, ont vu leur nombre diminuer de 8,0% et sont maintenant environ trois mille. Leurs dépenses totales de R&D ont baissé de 12,6%, tandis que le nombre de leurs chercheurs restait pratiquement constant, à environ 12 500. L'intensité de la R&D dans ces entreprises est de 2,5%.

Les entreprises qui subissent le plus la crise sont celles qui ont entre 10 et 49 salariés. Leur nombre a baissé de 17,0% et est maintenant d'environ 6 500. Leurs dépenses de R&D ont diminué de 16,2% et le nombre de leurs chercheurs de 8,6%, soit environ douze mille chercheurs en 2009. L'intensité de R&D s'est maintenue à un niveau raisonnable de 5,7%.

A l'opposé, le nombre d'entreprises comptant moins de dix salariés et qui font de la R&D (environ trois mille en 2009), a progressé de 9,64% par rapport à 2008. Les dépenses internes ont progressé quant à elles de 15,9% et le nombre de chercheurs a crû de 9,3%, soit quatre mille chercheurs à ce jour. L'intensité de R&D est de 17,7%, chiffre important qui s'explique par le fait que la grande majorité de ces entreprises appartient à des secteurs de haute technologie.

La conclusion de toutes ces données est que le nombre total d'entreprises qui font de la R&D diminue, mais que celles-ci essaient de maintenir leur activité en conservant leurs chercheurs ; même s'il n'est pas rassurant de constater que les entreprises qui emploient entre 10 et 49 travailleurs, sans doute en voie de consolidation, sont les plus vulnérables.

La capacité scientifique du système espagnol de l'innovation, mesuré en nombre de publications dans les revues internationales prestigieuses a augmenté de 8,5% en 2009 par rapport à 2008. Ce taux de croissance est très similaire à celui observé dans les autres pays, ce qui fait que la part des publications espagnoles reste à 3,25% de la production mondiale. En revanche, un autre indicateur de ce que produit l'innovation, le nombre de brevets, subit l'effet de la crise : le nombre de brevets déposés par des Espagnols a diminué de 0,9% par rapport à 2008 et le nombre de demandes de brevet européen d'origine espagnole a également diminué de 4,8%.

La production de biens de haute technologie en 2009 a connu une baisse de 12,4%, soit dix points de moins que la baisse subie par la production industrielle totale espagnole. Et cette baisse de la production industrielle se reflète dans le commerce extérieur de biens d'équipement. Les importations ont fortement chuté en 2009 et se retrouvent à des niveaux inférieurs à ceux de 2000. La chute des exportations a été moindre et retrouve les niveaux de 2005.

Les indices de référence mondiaux de la compétitivité internationale positionnent l'Espagne au 30ème rang quand le pays occupe la neuvième position en termes de richesses économiques. Il est vrai que selon l'indice IMD, basé principalement sur des données statistiques, l'Espagne a gagné de trois places entre 2009 et 2008, mais selon l'indice du Forum économique mondial qui prend en compte des données d'opinion, elle a en perdu neuf [2].

En ce qui concerne la politique en matière d'innovation, il faut souligner le bilan positif du programme CENIT, qui a mobilisé un budget total de 2,3 milliards d'euros, avec une contribution publique de 1,1 milliards [3]. Les 91 projets retenus à ce jour ont concerné 1 253 entreprises, dont 58% de PME, et ont réussi à impliquer 1 589 groupes de recherche publics et centres technologiques. Selon les données officielles, les 16 projets du premier appel d'offre, aujourd'hui achevés, ont été à l'origine de 211 demandes de brevets et de 565 publications scientifiques.

En 2010 la participation espagnole au septième programme-cadre de l'UE a continué à croître, principalement en raison du leadership dans les grands projets en matière de sécurité et d'énergie, ainsi que de l'amélioration de la participation du pays dans les thèmes des TIC et des transports notamment. Selon les résultats provisoires disponibles, le rendement obtenu en 2010 s'élève à 422,9 millions d'euros, soit 8,2% du budget alloué pour l'ensemble de l'UE-27. Les retours représentaient en 2010 7,5% du budget total. De ces retours, les entreprises ont obtenu 31,6%, les universités 23,5%, les centres de recherche publics, 16,5% et les centres d'innovation et de technologie, 11,4%.

COTEC a pu compter comme chaque année sur l'avis de son panel d'experts concernant l'importance des enjeux qui affectent le système d'innovation et son évolution probable dans un avenir proche. Cette année, la question considérée comme la plus importante par près de 83% de ces experts est la demande intérieure qui trop faible, ne peut avoir d'effet d'entrainement.

80% des experts considèrent comme problématique le manque de culture des marchés financiers espagnols pour l'innovation ; un problème récurrent, maintenant aggravé par la crise.

Pour 78% des experts, un autre problème important est la faible culture de collaboration entre les entreprises elles-mêmes et entre ces dernières et les centres de recherche. Ce problème que certains experts n'évoquaient pas dans le rapport 2009, inquiète désormais beaucoup plus. Cela peut être attribué à l'achèvement du programme CENIT qui a démontré non seulement l'importance de l'impulsion donnée par les fonds publics, mais aussi la pertinence de ce type de programme.

Une autre question d'importance, mais pour un plus petit nombre d'experts, est le faible engagement de ressources financières et humaines destinées à l'innovation dans les entreprises (74% des experts, un pourcentage en baisse depuis 2008). Autre pourcentage en baisse : celui des experts craignant que la R&D dans les universités et les centres de recherche publics ne soit pas suffisamment orientée vers les besoins technologiques des entreprises.

Un sujet de préoccupation croissant chez les experts est la pénurie de financement public pour le développement de technologies émergentes (+20% d'experts préoccupés). Cela peut être dû à la réduction des subventions publiques, la forme la plus appropriée de l'aide aux entreprises qui travaillent dans les secteurs émergents.

En ligne avec cette dernière préoccupation, 83% des experts, 20% de plus que l'an dernier, croient que la disponibilité des fonds publics pour promouvoir la R&D et l'innovation est à la baisse. La perception pessimiste des experts sur l'évolution future du système d'innovation se reflète dans l'indice composite Cotec, tombant en 2010 à la valeur de 0,899, le plus bas de la décennie. La tendance à la baisse a lieu depuis 2007, dernière année où la valeur de l'indice était supérieure à un, indiquant alors des attentes d'amélioration. En 2008, l'indice s'élevait à 0,990 et a chuté à 0,928 en 2009.

Face à l'évidente appréciation négative de la part des experts de l'évolution à venir du système espagnol d'innovation, il convient de noter que la chute en 2010 est d'environ la moitié de celle de l'automne de 2009 et est bien inférieur à celle observée en 2008. Par conséquent, on peut espérer un point d'inflexion à partir duquel reviendrait un certain optimisme quant aux capacités d'amélioration du système d'innovation.

--

[3] Depuis 2006, le gouvernement a mis en place à travers le ministère pour la science et l'innovation MICINN, un Consortium stratégique national en matière de recherche technologique appelé CENIT. L'objectif de ce programme est de financer des grands projets de recherche industrielle à portée scientifique et technique, dans des domaines d'importances stratégiques pour l'économie et la reconnaissance internationale du pays.

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Pour en savoir plus, contacts :

- [1] Site web de la fondation COTEC à partir duquel il est possible de télécharger gratuitement le rapport (en espagnol) : http://redirectix.bulletins-electroniques.com/hIlXk
Une version papier peut être sollicitée auprès de angela.dias@cotec.es
- [2] "Compétitivité de l'Espagne et rôle de l'innovation" : article paru dans le Bulletin Electronique Espagne de décembre 2010 et disponible gratuitement : http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/65359.htm

Code brève
ADIT :
67280


Source :

le rapport COTEC en question

Rédacteur :

Guy Molénat, attaché scientifique, service.scientifique@sst-bcn.com


http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/67280.htm

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