lundi 4 juillet 2011

Hybridations micro et nanotechnologiques : matière intelligente

Internet en 2049 : maîtres ou esclaves du numérique ? Le JDN publie chaque jour en avant-première un extrait du livre de Benoît Sillard et vous propose de partager votre vision de l'Internet en 2049.
Publié le 01/06/2011

L'auteur : Benoît Sillard est PDG de CCM Benchmark Group (éditeur du JDN), il a précédemment occupé les fonctions de Délégué interministériel aux usages de l'internet, fondateur de TV-Radio et PDG de Fun Radio
Le livre : Internet en 2049, maître ou esclave du numérique, Eyrolles, 13 mai 2011
Nanosciences et nanotechnologies désignent les procédés d'observation, d'analyse, de manipulation et de fabrication de la matière à l'échelle du nanomètre (nm). C'est la pointe la plus avancée des microtechnologies (1 millimètre fait 1 000 microns, 1 micron fait 1 000 nm), qui alimentent la tendance à la miniaturisation de tous les composants de nos machines. Pour donner un ordre de grandeur, un atome d'hydrogène mesure 0,1 nm, un cheveu fait 50 000 nm de diamètre.
Dès 1959, le génial physicien Richard Feynman percevait les possibilités de l'infiniment petit et lançait à ses collègues un peu médusés : " Pourquoi ne pourrions-nous pas écrire l'intégralité de l'Encyclopædia Britannica sur une tête d'épingle ? " (conférence " There's a lot of place at the bottom "). Ce qui paraissait alors invraisemblable est devenu une évidence, grâce à la loi de Moore qui permet de stocker toujours plus d'information et de puissance de calcul sur un support de dimension toujours plus restreinte.
Dans le livre prophétique Engins de création, l'avènement des nano technologies (document numérique 1986 ; édition papier Vuibert, 2005, réédition électronique 2007), Éric Drexler annonçait une époque nouvelle pour l'humanité, pleine de promesses et de menaces, avec la possibilité de manipuler la matière vivante ou inerte au niveau de ses composants élémentaires, donc d'ouvrir une ère d'abondance sans précédent. De nombreux produits industriels comportent aujourd'hui des nanomatériaux inertes intégrés dans leur processus de fabrication, dont les propriétés sont intéressantes en raison de leur taille : cosmétiques, textiles, accessoires de sports... Les nanotechonologies commencent à pénétrer notre environnement en profondeur, dans le domaine de l'énergie, de la recherche, de la santé et de l'information : transistors informatiques, encapsulation de médicaments, cellules photovoltaïques et LEDs, laboratoires scientifiques et médicaux sur puces...
On peut distinguer au moins quatre grands ensembles où les micro et nanotechnologies vont changer notre existence individuelle et collective dans les prochaines décennies.
Énergie renouvelable
Toute civilisation a besoin d'énergie, et elle périclite lorsque ses sources sont taries. Les énergies fossiles sur lesquelles a été bâtie la société industrielle moderne sont en voie d'épuisement rapide, et elles ont des effets délétères sur les équilibres climatiques. Parmi les grandes pistes actuelles pour trouver des solutions, l'énergie solaire s'impose comme la plus prometteuse : elle est naturelle, surabondante, et ne présente pas les risques liés à la fission ou fusion nucléaire. Les nanotechnologies, éventuellement associées aux biotechnologies, ouvrent des horizons pour exploiter les immenses flux de photons de notre astre, soit par des composants matériels innovants à haut rendement, soit par des fermes de micro-organismes génétiquement modifiés produisant du carburant. Les nanotechnologies promettent par ailleurs de trouver des solutions au stockage et au transfert de l'énergie. Par exemple, les nouvelles batteries à base de Lithium Fer Phosphate LiFePo4 pourraient permettre à brève échéance de recharger un mobile ou un portable en quelques dizaines de secondes (enerzine). Plus largement, des nanocapteurs sont appelés à recouvrir les objets aussi bien que les sites de production d'objets.
eSanté personnalisée
De nombreux essais cliniques sont en cours dans le monde pour évaluer le potentiel thérapeutique des nanotechnologies. Chaque personne est différente du point de vue de ses constituants biologiques (génome, épigénome, protéome, etc.) et chaque maladie aussi (par exemple, il y a plus d'une dizaine de cancers du sein, et non une seule forme). Les nanomédicaments seront des agents thérapeutiques individualisés, adaptés à chaque personne et à chaque pathologie, capables de repérer, cibler et corriger un trouble donné : développement d'une tumeur, insuffisance d'insuline, rétrécissement d'artère, neurodégénération locale... Mais la santé du futur ne se limite pas à cela : les chercheurs travaillent aussi à accompagner les malades dans un environnement intelligent (par exemple, vérification automatique du suivi d'un traitement ou signal d'alerte en cas d'indices physiologiques de détresse) et, plus encore, à prévenir les troubles plutôt que les guérir (identification de tous les marqueurs biologiques précoces de déséquilibre, indiquant que l'on entre dans un processus pathologique détecté au moment même où il se déclenche).
Micro-industrie à la demande
L'échelle micro et nanométrique couplée aux systèmes d'information bouleversera de fond en comble le mode de production industrielle concentré et gigantesque qui s'est mise en place au XVIII e siècle. La manipulation des atomes deviendra aussi facile demain que celle des bits hier et aujourd'hui. Plutôt que des grands centres produisant des objets de masse, on aura de plus en plus d'unités de microproduction assurant des usinages personnalisés. On en voit les premiers effets aujourd'hui. Il est déjà possible de construire son projet micro-industriel : invention ou idée, conception du design (avec des outils comme Blender, ScretchUp), sortie des prototypes (imprimantes 3D comme MarketBot), manufacture (usine trouvée en plateforme BtoB selon le nombre d'exemplaires souhaités), vente (depuis des sites Internet). La maîtrise de la matière à l'échelle nanométrique pourrait permettre de simplifier encore les dernières phases : je commande un produit qui me plaît, je le personnalise, ce produit est fabriqué chez moi par une " imprimante 3D " ou près de chez moi par un centre spécialisé de microproduction.
Internet ubiquitaire (objets, vivant, Terre)
Maîtres ou esclaves
Voir aussi : Tous les articles de la série
L'Internet des objets est déjà en cours de déploiement. Grâce à des émetteurs (principalement de type puces RFID aujourd'hui), on peut connecter au réseau numérique des objets et plus généralement des entités physiques (animaux, végétaux) possédant des identifiants électroniques et traiter toutes les données s'y rattachant. La miniaturisation des données vers l'échelle micro et nano permet de créer un maillage dense de capteurs, récepteurs, émetteurs, senseurs assurant en tendance un monitoring en temps réel de tout l'espace terrestre. Il sera doublé d'une ceinture intelligente de satellites artificiels permettant des couvertures globales. L'environnement des individus devient alors intelligent et, par un terminal numérique géolocalisé, ils peuvent s'informer de toutes les données ou tous les événements pertinents pour leurs besoins du moment. L'Internet ubiquitaire assure aussi le suivi dans l'infosphère des équilibres et déséquilibres de la biosphère et de l'écosphère, par exemple des menaces sur la biodiversité, des signaux précoces de catastrophes naturelles (tremblement de terre, éruption volcanique, tsunami), des indices de dérèglements météorologiques (court terme) et climatiques (long terme)...
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Benoît Sillard

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