A lire sur: http://www.pcinpact.com/news/79609-des-septembre-telephone-et-internet-entre-grandes-oreilles-thales.htm
Le rapport sur la justice d'octobre 2012,
rédigé par le député Christian Eckert au nom de la commission des
finances l’annonçait tambour battant : la mise en place d’une plateforme
nationale aux interceptions judiciaires (PNIJ) en 2013 va alléger les
coûts des grandes oreilles de l’État. Mais depuis, quelques couacs
jetent le trouble sur ce beau projet aux grandes oreilles.
Selon le rapport sur la justice, cette PNIJ voulue par Sarkozy «
permettra aux officiers de police judiciaire d’envoyer aux opérateurs
de téléphonie mobile leurs réquisitions de façon dématérialisée et de
valider, également par voie dématérialisée après réception de la
prestation, le service fait ». Du super matériel tout automatique : «
Les opérateurs, qui n’auront plus besoin d’établir de mémoires de
frais, adresseront mensuellement et de façon dématérialisée leur facture
pour paiement. Les frais seront payés au plan central, et non plus par
les juridictions. » Le rêve !
À
ce jour, des équipements éparpillés dans près de 350 centres de police
et de gendarmerie permettent de mener à bien ces mesures mais à un coût
non neutre. Avec des millions de réquisitions et des dizaines de
milliers d’écoutes judiciaires, les factures s’envolent gaiement.
Autre gouffre : des réquisitions sur des prestations nouvelles non
tarifées comme la géolocalisation, ou l'interception de communications
électroniques. Non tarifée, donc sans grille tarifaire et aux montants
libres.
« Un mois de réquisitions
chez un opérateur de télécommunication »
Confidentiel
Avec
la PNIJ, de l’enfer économique on glisse au paradis numérique pour ces
opérations autorisées par un magistrat : plus de frais de location de
matériel comme actuellement, des frais d’opérateurs en moins « en
raison de la dématérialisation des échanges entre les enquêteurs et les
opérateurs, et permettre ainsi une nouvelle révision tarifaire à la
baisse », des factures accélérées, n’en jetez plus !
Depuis,
le passage de la théorie – le rapport – à la pratique – le déploiement -
a connu quelques flottements. D’abord, deux journalistes d’Owni ont été
convoqués voilà peu à la Direction centrale du renseignement intérieur
(DCRI) pour avoir diffusé un document confidentiel-défense d’une trentaine de page détaillant le programme fonctionnel de la PNIJ. Le document retiré depuis par Scribd pour « atteinte à la propriété intellectuelle » est toujours diffusé par Owni.
Un batiment, deux grandes oreilles
Sa lecture montre que la PNIJ a un sacré objectif, résument en septembre 2011 nos confrères Andréa Fradin et Pierre Alonso : « concentrer
en un même endroit, tenu (évidemment) secret, toutes les demandes de
policiers, gendarmes et douaniers visant à surveiller ou consulter les
communications téléphoniques ou électroniques d’un individu. Ainsi
(évidemment) que les données résultant des écoutes, relevés de
géolocalisation, suivi de navigation sur Internet – entre autres
joyeusetés ». Bref, deux grandes oreilles apposées sur les câbles
et les ondes des opérateurs internet, téléphonie fixe et mobile dans le
cadre d’enquêtes judiciaires. Et le tout, concentré dans un bâtiment de
Thales, le géant français de la défense.
Dès 2011, selon l’Express qui sort aujourd’hui une enquête
sur le sujet, le directeur général de la police nationale, Frédéric
Péchenard, avait critiqué ce choix craignant qu’il devienne « une cible potentielle, du fait même de la concentration de données sensibles ». Il précisait par ailleurs que « cette fragilité a été soulignée par l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information
» Autre chose, la plateforme a été dupliquée. Saine mesure, sauf que ce
clone n’est installée qu’à 300 mètres de là, à Élancourt à portée d’un
incident majeur (incendie, etc.).
Des coûts, des coûts, des coûts
Toujours selon nos confrères, alors que la PNIJ devait être source d’économie, les frais de déploiement s’envolent gaiement. « A
l'origine, le Big Brother devait coûter 17 millions d'euros. À présent,
la douloureuse se monte à 43 millions. Au bas mot. Car Orange, SFR,
Bouygues Telecom, Free et Numéricâble ont dû déployer des fibres
optiques jusqu'au site d'Élancourt pour répondre à leurs obligations
légales d'acheminer les communications ». Et les coûts pourraient
encore s’envoler puisque s'ajouterait le redimensionnemment des systèmes
de police pour se connecter à ce système. Autre chose : aujourd'hui,
ces opérations sont gérées en association avec 6 sociétés. Faute d'avoir
été notifiées préalablement, cinq ont décidé d'attaquer le marché
confidentiel défense remporté par Thales. L'Etat qui refuse d'annuler ,
pourrait maintenant signer un beau chèque après une décision de justice
favorable aux acteurs privés.
Le choix Thales va en outre donner naissance à des situations primesautières : « la
société est elle-même sous le coup de plusieurs procédures susceptibles
de déclencher des réquisitions et des écoutes à son encontre. Et ces
informations sensibles seront alors hébergées... dans ses propres locaux
! » s’étonne l’Express.
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