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Principe de fonctionnement de la cellule thermoélectrochimique développée à l'université Monash (Australie). Une fois fixée sur un conduit chaud (entre 100 °C et 200 °C, hot), elle produit un courant électrique (power) grâce à la différence de température qui existe par rapport à une partie plus froide du dispositif (cold). © Douglas MacFarlane, Theodore Abraham, université Monash
Comme d’autres
installations, les centrales à charbon perdent chaque jour une grande
quantité d’énergie thermique : la chaleur résiduelle. Pourtant, elle
pourrait partiellement être convertie en électricité, sans qu’un seul
gramme de CO2 soit émis, par exemple grâce aux cellules
thermoélectrochimiques. Une équipe australienne vient d’ailleurs de
battre un record de performance en la matière.
Le 24/07/2013 à 15:27
- Par
L'effet Seebeck, qui explique le
fonctionnement des thermopiles, a été découvert en 1821 par un physicien
allemand, Thomas Johann Seebeck, grâce à l’aiguille d’une boussole. ©
Gerardtv, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0
Les centrales à charbon utilisent
de l’énergie thermique pour produire de l’électricité, mais les
procédés employés sont loin d’être efficaces. En effet, une certaine
quantité de chaleur n’est pas utilisée ou perdue durant les différents
processus ayant cours dans les installations. Elle est alors qualifiée
de résiduelle. Dans l’exemple pris, il y en a notamment dans les gaz d’échappement évacués par les cheminées,
dont la température peut être comprise entre 100 et 200 °C. Bien
évidemment, ces pertes ont un coût. En 2012, il a été estimé par
Ecoheat4eu à 1.000 euros par citoyen européen (14 pays ont été pris en
compte, dont la France) et par an.
De nombreux industriels ne sont pas insensibles à
cette situation, et ont dès lors développé des solutions pour tirer
profit de la chaleur résiduelle. Des cimenteries exploitent par exemple l’air chaud qui sort de leurs fours pour sécher des briques. Au Royaume-Uni, des centrales thermiques se sont vues adjoindre un système de cogénération :
les gaz chauds sont refroidis par de l’eau, qui récupère au passage une
certaine quantité d’énergie. L’eau chaude sert alors à d’autres fins,
comme pour le chauffage.
Dorénavant, et grâce à des chercheurs de
l’université Monash, en Australie, un nouveau système permet une
meilleure production directe d’électricité à partir de la vapeur ou de la fumée produite par les industries.
Principe de fonctionnement de la cellule thermoélectrochimique développée à l'université Monash (Australie). Une fois fixée sur un conduit chaud (entre 100 °C et 200 °C, hot), elle produit un courant électrique (power) grâce à la différence de température qui existe par rapport à une partie plus froide du dispositif (cold). © Douglas MacFarlane, Theodore Abraham, université Monash
Une solution pour convertir de la chaleur en électricité : la thermopile
Theodore Abraham, Douglas MacFarlane et
Jennifer Pringle ont eu l’idée d’adapter une cellule
thermoélectrochimique pour la rendre fonctionnelle au contact d’un gaz
ou d’un liquide qui présente une température comprise entre 100 °C et
200 °C (contrairement au modèle standard, inopérant au-delà de 100 °C).
De quoi s’agit-il ?
Ce système exploite l’effet Seebeck.
Concrètement, une différence de potentiel apparaît lorsque deux
matériaux présentant des températures différentes entrent en contact par
le biais d’une jonction. La quantité d'électricité produite,
bien souvent quelques dizaines ou centaines de millivolts dans les
thermopiles actuellement employées dans l'électronique, est alors
proportionnelle à la différence de température.
La technologie australienne diffère quelque peu de
ce modèle de base. En effet, la cellule produite se compose de deux
électrodes. La première est en contact avec la canalisation qui véhicule l’énergie thermique,
elle est donc chaude, tandis que la seconde est froide, car réfrigérée
par de l’eau ou de l’air. Entre les deux se trouve un liquide ionique
servant d’électrolyte, donc riche en ions mobiles.
La clé technologique : l’électrolyte avec le meilleur coefficient de Seebeck
Pour améliorer cette technologie, les chercheurs ont
manipulé le couple redox du cobalt(II/III) tris(bipyridyl) par le biais
d’échanges d’anions, pour accroître sa solubilité dans le liquide ionique et
dans du 3-méthoxypropionitrile. Grâce à ces opérations au vocabulaire
barbare, ils ont tout simplement créé l’électrolyte qui présente le plus
grand coefficient de Seebeck (Se, ici entre 1,5 et 2,2 mV/K), que d’autres appellent pouvoir thermoélectrique. Ces résultats ont été publiés dans la revue Energy and Environmental Science.
Lors des tests menés avec des gaz d’une température
de 130 °C, la densité de puissance surfacique du dispositif a dépassé
0,5 W/m2, malgré le fait que le système n’avait pas été pleinement optimisé.
Les thermopiles à liquide ionique sont avantageuses pour plusieurs raisons. Entre autres, l’électrolyte est
résistant aux hautes températures (un fait déjà évoqué), tout en étant
non volatil et stable d’un point de vue électrochimique. Ainsi, il ne
s’évapore pas sur le long terme. De plus, ces dispositifs sont
modulables à souhait, par exemple pour s’adapter à la forme d’une
canalisation, et produisent de l’électricité sans émettre de gaz à effet de serre (comme le CO2).
Que penser de cette cellule thermoélectrochimique ?
Avec ce système, les chercheurs australiens viennent d’établir un nouveau record, en produisant plus de thermoélectricité que
les autres cellules développées dans le passé, pour la même gamme de
températures. Cette avancée nous a permis d’évoquer une problématique
peu abordée de nos jours : les pertes liées à la formation de la chaleur
résiduelle.
Cette ressource énergétique est produite en quantité à chaque instant, et elle termine sa vie dans l’atmosphère…
Pourtant, nous pourrions l’exploiter pour produire une électricité
verte à moindre coût (les matériaux qui constituent une cellule sont peu
onéreux). Souhaitons un bon développement à cette technologie, en
espérant qu’elle sortira rapidement des laboratoires.
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L’avenir fera la part belle aux technologies vertes,
ce que de nombreux ingénieurs et chercheurs ont bien compris. Publiée
toutes les deux semaines sur Futura-Sciences, la chronique Greentech dévoile
et décrypte les projets innovants, visant à réduire l’impact de l’Homme
sur son environnement, tout exploitant au mieux les ressources
naturelles renouvelables.