Par Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences
L’appareil photo Lytro est « plénoptique »
: il saisit les images en profondeur et avec lui, on fait la mise au
point… après, lorsqu’on regarde la photo. Le principe théorique est
ancien et Adobe et Raytrix ont déjà présenté des modèles. Mais c’est la
première fois qu’il se concrétise dans un minuscule appareil grand
public. Issu de recherches à l’université Stanford, il tient dans la
poche et ringardise les appareils actuels…
- À lire, notre dossier sur la photo numérique
Le petit appareil photo
que vient de présenter la start-up américaine Lytro ne ressemble à rien
de connu. Ce boîtier de section carrée en aluminium anodisé (41 x 41 x
112 mm, 214 g), qui évoque plutôt un gros paquet de chewing-gums, ne
comporte pas tous les réglages habituels.
Avec lui, on ne se préoccupe ni de mise au point ni
d’ouverture de focale ni de mode de prise de vue. On vise avec le petit
écran LCD de 3,3 cm de diagonale, on choisit la puissance du zoom (8x) et… clic-clac.
Un
objectif ouvrant à f2, un zoom 8x, un déclencheur, un petit écran à
l'arrière, une coque en aluminium coloré : l'aspect du Lytro n'est pas
conventionnel. Le cœur de l'appareil non plus. © Lytro
Une image à reconstituer par logiciel
Tout se passe ensuite sur ordinateur
: l’image apparaît avec, comme d’habitude, un plan net et les autres
plans flous. Mais en cliquant sur différents endroits, la zone cliquée
devient nette, comme si la mise au point se faisait à ce moment-là. Par
exemple, le personnage central devient flou tandis qu’apparaît nettement
le mur derrière lui. Les photographies montrées sur le site de Lytro
permettent de bien comprendre l’effet, illustré ici par des images
capturées sur trois plans de la même photo (issue du site de Lytro).
L’effet est saisissant et l’appareil n’est pas un
prototype : il sera mis en vente l’an prochain aux États-Unis, en 8 ou
16 Go, enregistrant respectivement 350 et 750 images, aux prix,
respectifs, de 400 et 500 dollars (290 et 360 euros environ). Le
logiciel, actuellement sous MacOs, sera d’ici là adapté à Windows et
permettra en outre de profiter des capacités d’un écran 3D.
Trois
images mais une seule prise de vue ! Sur celle du haut, l'otarie du
premier plan est nette. Un clic sur l'otarie du milieu déclenche la mise
au point sur elle et on peut aller jusqu'à rendre nette la maison de
l'autre côté de la baie. © Jason Bradley/Lytro
La plénoptique, une vieille idée
Comment fonctionne-t-il ? Le principe consiste à
enregistrer plusieurs images, grâce à un réseau de microlentilles
installé entre l’objectif et le capteur. Ce dispositif capte la lumière de multiples directions et forme une image en mosaïque. Le capteur
enregistre ainsi une succession d’images, comme si elles avaient été
prises sous des angles différents. Un même point de la scène
photographié correspond à autant de pixels
qu’il y a de microlentilles. Un logiciel doit ensuite retrouver tous
ces pixels pour former une image et il le fera différemment selon la
zone cliquée par la personne devant l’écran.
L’idée n’est pas neuve et repose même sur des
travaux anciens. Elle s’est trouvé un nom : le procédé plénoptique. En
2007, Adobe avait déjà montré un prototype d’appareil plénoptique et l’entreprise allemande Raytrix propose une gamme à vocation professionnelle. Aux États-Unis, un jeune chercheur de la Stanford University, Ren Ng s’est intéressé au sujet et a publié une thèse intitulée Digital Light Field Photographie, soit Photographie numérique plénoptique.
Il est aujourd’hui à la tête de Lytro, l’entreprise
qui veut proposer ce procédé au grand public. Cet étrange appareil
diffère tout de même d’un modèle classique et ne va pas sans
inconvénients. Lorsqu’il s’agit de visionner une photographie, il faut
disposer du logiciel. Pour l’imprimer ou l’installer sur le cadre de
mamie, il faudra choisir un plan et produire une image JPeg.
Trois
étapes du calcul de « démosaïquisation », illustrées dans la thèse de
Ren Ng, alors chercheur à l'université Stanford. On comprend que
l'ordinateur doit piocher dans chaque petite image, chacune formée par
une des microlentilles du réseau installé entre l'objectif et le
capteur. © Ren Ng
Sans doute pas un concurrent des appareils classiques
La résolution des images est de qualité « HD », donc
sans doute 720 pixels de côté (les images sont carrées) selon les
spécifications données sur le site. Lytro ne parle pas en mégapixels
mais en nombre de rayons : il y en aurait 11 millions. On est donc loin
de la qualité d’un appareil photo
classique, ce qui est logique puisqu’un point de l’image s’inscrit sur
de multiples photosites du capteur. Les informations supplémentaires sur
les différentes zones de netteté se paient ainsi, par une chute de la
résolution.
Le Lytro est donc puissamment novateur mais aussi
puissamment original et n’entrera pas en compétition avec les appareils
traditionnels. En revanche, son intérêt est réel pour saisir sur une
seule image l’intégralité d’une scène, de l’avant-plan jusqu’à
l’horizon.
http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/technologie-1/d/lytro-lappareil-photo-3d-sans-mise-au-point_34156/#xtor=EPR-17-[QUOTIDIENNE]-20111025-[ACTU-lytro__l_appareil_photo___3d___sans_mise_au_point]
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire