A lire sur: http://www.lesechos.fr/opinions/edito/0203269199914-la-fin-du-miracle-emergent-645689.php
Par Guillaume Maujean | 27/01 | 06:00
Par Guillaume Maujean | 27/01 | 06:00
Longtemps, on les a crus insubmersibles. Les pays émergents ont conservé des rythmes de croissance appréciables quand le monde développé sombrait dans la récession, leurs banques se sont tenues à l'écart de la crise financière et leurs marchés, d'actions comme de dette, étaient portés par l'appétit insatiables des investisseurs étrangers. Mais, en à peine quelques mois, la donne a changé. Et la chute spectaculaire de plusieurs devises en fin de semaine dernière - le peso argentin, la livre turque, le rouble russe, le bath thaïlandais ou le rand sud-africain, entre autres - a mis en exergue la grande fragilité de ces pays et l'instabilité chronique de leurs marchés. Car les trois piliers sur lesquels reposait le « miracle » émergent semblent aujourd'hui vacillants.
Le premier, c'était la locomotive chinoise, la vigueur de sa production et son énormeconsommation de matières premières. Le ralentissement de l'ex-empire du Milieu, passé d'une croissance de 10 % à 7,5 %, a eu de fortes répercussions sur ses voisins comme sur ses fournisseurs. Le deuxième pilier, c'était la politique monétaire américaine, l'engagement de la Fed à maintenir ses taux à zéro et ses injections massives de liquidités. Dès que Ben Bernanke, le patron de la banque centrale américaine, a évoqué la fin de cette politique, les flux de capitaux vers les émergents se sont brutalement inversés, provoquant de très fortes turbulences. Le troisième pilier, c'était la conviction que la dynamique émergente allait s'autoentretenir, que la plupart des pays étaient en passe de changer de modèle économique pour faire plus de place à la consommation domestique et améliorer leurs comptes courants. Les difficultés récentes du Brésil ou de l'Inde ont montré qu'on était encore loin du compte.
La question est maintenant de savoir si ces facteurs de vulnérabilité peuvent enclencher une véritable crise émergente, comme celles de 1994 (Mexique), 1997 (Asie) ou 2002 (Argentine). Globalement, les pays semblent mieux armés que par le passé. Ils disposent d'importants stocks de réserves de change, leurs monnaies sont flexibles et leurs taux d'endettement très faibles : on est donc loin de la configuration qui avait conduit à la crise asiatique. Mais les mauvais points restent nombreux : des déficits budgétaires importants, des réformes structurelles trop lentes, une inflation pas toujours maîtrisée et des risques politiques encore très présents, comme c'est le cas en Turquie, en Ukraine ou en Thaïlande. 2014 est une année d'échéances électorales cruciales pour de nombreux pays, de l'Inde à la Turquie, en passant par l'Afrique du Sud, l'Indonésie ou le Brésil. A coup sûr, les émergents n'en ont pas fini avec la volatilité, les à-coups et l'instabilité...
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