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La pénétration graduelle des objets connectés dans le secteur de la santé ne peut se faire que par le biais d'un processus long de réglementations.
Interview du Docteur Nicolas Postel-Vinay, praticien dans l’unité d’hypertension artérielle de l’hôpital Européen Georges-Pompidou et Directeur du site automesure.com
Les objets connectés sont principalement utilisés maintenant pour le Quantified Self, qu'en est-il d'un usage réellement médical, intégré dans l'écosystème de soin ?
Premièrement, il faut s'entendre sur ce qu'on appelle les objets connectés. Si on parle des dispositifs grands publics ne répondant pas à la réglementation médicale et qui sont connectés depuis quelques années, tout est à construire au point de vue du jugement médical. Il faut savoir exactement quel apport est possible en termes soit de prévention, soit de diagnostic ou de traitement. Et en l'occurrence toutes les études restent à faire. En revanche, on a une antériorité assez importante sur ce qu'on appelle la télémédecine, c'est à dire la connexion parfois des mêmes objets mais dans un cadre médical et non plus grand public. Dans ce cas-ci, nous avons déjà des connaissances qui sont très solides. De même, nous avons aussi des connaissances sur l'utilisation possible de ces objets quand ils n'étaient pas encore connectés mais dont on connaît l'utilité en médecine. Le sujet des objets connectés et de la médecine est trop large à couvrir par le fait que celui-ci recouvre des réalités très différentes, il s'agit maintenant d'analyser la situation non pas en termes globaux mais situation par situation, dispositif par dispositif.
Qui aura pour rôle de maîtriser ces données ? Est-ce que ce sera le travail d'acteurs intermédiaires, comme des gestionnaires de données ?
On en revient à la question de l'usage des données quant à leur utilité. Par exemple, en ce qui concerne le poids des insuffisants cardiaques ou rénaux, ou des femmes enceintes, la donnée dans ce cas peut être utile et les médecins auront effectivement un intérêt à récupérer et analyser ces données depuis les patients directement. En revanche, si l'on s'attarde simplement sur le poids de Monsieur et Madame Tout-le-monde, l'intérêt médical est à peu près nul. Il y a un véritable intérêt aux données médicales uniquement dans des cas spécifiques.
Pensez vous que pour les incorporer les médecins et personnels médicaux vont devoir changer de business model ?
Complètement, mais ça viendra de plusieurs niveaux. Premièrement, en France depuis 2010, un arrêté définit ce qu'est la télémédecine. A partir de ce moment, on a une ouverture sur la possibilité de réglementer l'analyse du médecin entre un patient, un appareil connecté et les résultats qu'il reçoit. Cette ouverture, permise par la loi, est en cours d'expérimentation, il y a pas encore à proprement parler de décision prise, et de toute façon il y aura des conditions extrêmement strictes en termes d'anonymisation des données, de consentement, d'accusés de lectures etc... Les appareils connectés qui répondront aux conditions réglementaires ne seront pas forcément des appareils grand public. Deuxième élément, la FDA aux Etats-Unis se pose la question de réglementer les objets connectés. Si cela aboutissait, on changerait dès lors complètement de modèle économique puisque cela obligerait les concepteurs, les fabricants à rentrer dans des process beaucoup plus exigents donc beaucoup plus lents et couteux, ce qui représentera une réelle transformation du business model.
Pour vous, les objets connectés s'adresseront-ils à tous ou seront-il réservé à une "élite" plus à même de les financer ?
Nous avons très bien vécu cela pour la mesure de la pression artérielle, avant que les appareils ne soient connectés. La jonction entre les médecins, les patients et la règlementation met du temps. Le temps de produire les études scientifiques, d'obtenir la validation des appareils, d'obtenir les acceptations des médecins une fois que les études scientifiques montrent des réusultats positifs. Dans le cas de la pression artérielle, cela a pris près de 20 ans. Peut être que les choses vont s'accélérer, mais dans le cas de la pression artérielle, il faut noter que l'automesure ne se fait plus maintenant dans un différentiel riche-pauvre, du moins plus de façon majeure.
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03 juillet 2012
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