vendredi 12 juillet 2013

Le choc de complexification, c'est maintenant !

A lire sur:  http://www.lesechos.fr/opinions/points_vue/0202887414380-le-choc-de-complexification-c-est-maintenant-585088.php?xtor=EPR-1500-[idees_debats]-20130711-[s=461370_n=9_c=907_]-1277694[_SDV]@1

Par Les Echos | 11/07 | 06:00 | 

Le « contrat de génération », qui vient grossir la pile déjà élevée des contraintes pesant sur les moyennes ou grandes entreprises, n'est qu'un énième replâtrage médiatique « pour l'emploi ». Il montre surtout combien nos gouvernants sont éloignés des réalités économiques.

François Hollande a lancé « le choc de simplification » pour alléger les procédures administratives, diminuer les normes et raccourcir les délais des démarches pour les collectivités locales et les entreprises. Je me souviens qu'il y a dix ans déjà, Jacques Chirac parlait des mêmes simplifications que j'attends toujours…
Sur la pile de mes démarches à faire : le « contrat de génération » à mettre en oeuvre avant le 30 septembre. Etant à la tête d'une entreprise de 360 salariés, je sais déjà que si je ne dépose pas d'accord collectif ou de plan d'action de génération à temps je serai passible d'une pénalité.
Mais comme je suis présumé être un chef d'entreprise plein de vilains préjugés, la loi m'oblige à prendre enfin des engagements « d'intégration durable des jeunes » et de « recrutement et de maintien en emploi des seniors, de transmission des savoirs et des compétences ». Je dois me « concentrer sur des actions de prévention du vieillissement ». Diable ! Comme vais-je faire pour prévenir le vieillissement ?
S'agissant des engagements en faveur de « l'insertion durable des jeunes », je dois avoir des objectifs chiffrés en matière de recrutements de jeunes en CDI avec la mise en place d'un « parcours d'accueil » (?), la désignation d'un « référent » (?), puis il faut « mettre en oeuvre un entretien de suivi entre le jeune, son responsable hiérarchique et son référent ». Et il y a bien sûr le passage obligé de « l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ».
Cette mesure portant le nom étonnant de « contrat » est pour moi un beau casse-tête. Sur 360 salariés, je n'ai que 2 salariés de plus de 60 ans ! J'ai embauché en dix-huit mois environ 30 salariés dont 80 % de « jeunes » très qualifiés et ayant entre 0 et 4 ans d'expérience professionnelle ! Et n'étant pas complètement abruti, j'encadre mes jeunes (et moins jeunes) salariés par des responsables d'équipe sans avoir besoin de nommer des « référents » ou de faire un « parcours d'accueil ». Enfin, je ne regarde pas le sexe des personnes pour faire de la mixité à tout prix !
On peut facilement constater, à la lecture de cet ensemble de bons sentiments mêlés d'idéologie égalitariste et sexiste, combien nos gouvernants sont éloignés des réalités économiques.
La publicité gouvernementale des premiers accords signés porte sur des activités matures comme la petite industrie agroalimentaire. Le président de la République n'a-t-il pas visité l'entreprise Amiotte Saucisse dans le Doubs pour y signer « le contrat » qui organise l'emploi d'un jeune ?
On peut voir dans cette loi une conception romantique (pour ne pas dire archaïque) du travail où le savoir-faire, l'artisanat de qualité se transmettent dans un cadre idyllique où les « anciens » forment « les jeunes » aux gestes ancestraux du « métier ». On trouve dans le meilleur des cas du secteur du bâtiment typique où le savoir-faire se fait effectivement sur le tas. Mais dans le pire des cas, cette pseudo-formation se fait sur des postes ne nécessitant aucune qualification (manutention, conditionnement…). Les premiers exemples illustrent hélas ce triste constat de l'inefficacité économique.
On est loin des préoccupations des ETI (entreprises de taille intermédiaire) en forte croissance ou simplement matures qui embauchent plus de bac+5 hautement qualifiés que de « jeunes en formation ». Il est illusoire de penser que les formations traditionnelles « sur le tas » suffiront à former les techniciens et ingénieurs hautement qualifiés dont on a tant besoin dans l'industrie ou les services à forte valeur ajoutée.
Il est regrettable que les chefs d'entreprise soient encore les boucs émissaires d'un gouvernement qui a une vision théorique de l'entreprise. Ce « contrat de génération » n'est qu'un énième replâtrage médiatique « pour l'emploi ». Il vient se rajouter sur la pile déjà élevée des contraintes qui pèsent sur les moyennes ou grandes entreprises. Nos compétiteurs étrangers ne perdent pas leur énergie dans des projets d'entreprise modelés par des considérations idéologiques.
René Sentis
René Sentis est PDG d'EBP

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